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degré ; au-dessus comme au-dessous de ce degré, l’homme est malade. Mais Broussais déclare abandonner Brown aussitôt, parce que Brown, dit-il, prend la voie de l’abstraction en dissertant sur l’excitation considérée en elle-même, tandis que lui, Broussais, aime mieux étudier ce phénomène dans les organes et les tissus excités. Il est vrai que Brown se perdra dans les abstractions, comme M. Broussais s’y perdra lui-même, — chacun à sa manière. — Mais Brown comprenant en principe qu’il faut observer l’unité organique, l’état général de l’organisme, avant d’étudier les organes ou les tissus en détail, puis déduisant de cette observation sa doctrine des diathèses (ou dispositions morbides), Brown, disons-nous, nous paraît avoir une conception plus grande que celle de M. Broussais.

Quoi qu’il en soit, le premier et principal instrument de l’excitation, suivant Broussais, c’est la contractilité, c’est-à-dire la condensation, le raccourcissement de la fibre animale sous ses trois formes fondamentales, qui sont la fibrine, la gélatine, l’albumine.

C’est ce phénomène de la contraction de la matière animale qui est pour M. Broussais le point de départ de tous les phénomènes physiologiques et pathologiques. S’il y a excès de contraction, nous avons l’irritation (qui est elle-même le premier degré de l’infammation) et ses conséquences ; s’il y a défaut de contraction, nous avons l’abirritation, ou le relâchement des tissus, l’atonie, la passivité, et toutes ses conséquences : donc, deux ordres de maladies :

Les unes par défaut d’excitation, maladies abirritatives ;

Les autres par excès d’excitation, maladies irritatives.

Maintenant, en fait, M. Broussais n’admet presque que des maladies irritatives, et sa grande guerre contre Brown consiste justement en ce que celui-ci, qui admet également les maladies irritatives, ne voit presque jamais, en fait, que des maladies abirritatives. — M. Broussais développe fort longuement dans tous ses écrits comment le défaut d’excitation produit les maladies irritatives : selon lui, l’organe qui manque de son excitation normale, qui, par défaut d’excitans, se trouve dans la langueur et la débilité, cet organe est par là même plus susceptible d’irritation ; il se fait en lui une réaction qui peut passer facilement par tous les degrés de l’excitation, de l’irritation, de l’inflammation. Donc, un grand nombre de maladies, quoique primitivement abirritatives, sont réellement irritatives, puisqu’elles ne peuvent guère rester abirritatives. Presque toutes les maladies sont donc irritatives, les unes primitivement (c’est le plus grand nombre), les autres consécutivement. Presque toute la médecine