cette magie sans laquelle le monde est froid et sombre, je saurai me faire aimer… Je ne serai plus le triste philosophe dont l’aspect n’inspire que la crainte, et la parole que l’ennui ! Maussade enveloppe, disgracieuse gravité, je vais te dépouiller comme un vêtement d’hiver aux rayons du printemps… Oh ! je suis vaincu !… L’espérance d’être heureux m’a rendu l’espérance d’être bon ! Oui, je saurai aimer avec justice, avec douceur, avec confiance, car je saurai que je puis être aimé de même ; et mes amis seront heureux de mon bonheur, car je leur en parlerai naïvement, et ils verront que mon ame est sincère dans la joie comme dans la souffrance.
Scène II.
Oui ! oui ! compte sur eux, compte sur elle, compte sur toi-même ! c’est là que je t’attends ! Il me semble que, malgré ses forfanteries, l’Esprit de la lyre va enfin être chassé d’ici. Alors Hélène me revient de droit, et nous verrons comment monsieur le philosophe prendra l’amour conjugal avec la veuve d’un ange devenue maîtresse du diable.
Comme elle est pâle et triste ! Ah ! son dernier chant l’a brisée ! — (S’approchant d’elle.) Hélène ! êtes-vous plus malade, mon enfant ? — Elle ne m’entend pas, ou ne veut pas me répondre. — Chère Hélène, si vous m’entendez, répondez-moi, ne fût-ce que par un regard. Votre silence m’inquiète, votre indifférence m’afflige.
Elle m’entend cependant, mais il semble que mes paroles n’aient aucun sens pour elle. Peut-être si je lui montrais la lyre, retrouverait-elle la mémoire.
Allons ! sa raison est entièrement perdue, il faut un miracle pour la ressusciter. Si je suis dupe d’une grossière imposture, pardonnez-moi, ô vérité ! ô Dieu !… Pour la première fois je vais avoir recours à autre chose que la certitude.