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DES COLONS.

Le colon du moyen-âge prend sa place entre l’homme libre et le serf. Il descend du colon romain, et nous avons besoin, pour connaître sa condition sous les Francs, de remonter au colonat de l’empire, tel qu’il fut réglé par la législation romaine.

DU COLONAT SOUS LES EMPEREURS ROMAINS[1]

D’après les codes de Théodose et de Justinien, le colon est l’homme qui, inséparablement attaché à la culture d’un fonds étranger, en fait les fruits siens, moyennant une redevance fixe qu’il paie au propriétaire. Vivre et mourir sur le sol où il est né, c’est là son destin, comme celui de la plante. Mais, esclave par rapport à la terre, il est libre à l’égard des personnes ; et, quoique placé ainsi dans une condition intermédiaire entre la liberté et la servitude, il est en définitive mis au rang des hommes libres par le droit romain.

Les colons, tels qu’ils viennent d’être définis, apparaissent clairement, pour la première fois, en 332, dans une loi de Constantin ; mais comme dès-lors ils étaient répandus dans tout l’empire, on doit les croire plus anciens. On pourrait même constater leur existence au commencement du IIIe siècle de notre ère, par deux passages des jurisconsultes Marcien et Ulpien[2], qui florissaient vers cette époque, si l’interprétation de ces passages n’était pas sujette à controverse. Quant aux textes de César, de Varron et de Columelle, il n’est guère possible de voir autre chose que des fermiers libres dans les coloni qui s’y trouvent mentionnés. Mais ce que rapporte

  1. On peut consulter sur le colonat romain, après le Paratitlon et les commentaires de Jacques Godefroi dans le Code théodosien (liv. V, tit. IX), la dissertation allemande de M. de Savigny (dans son journal consacré à la science historique du droit, tom. VI, cahier III, pag. 273-320, et dans les Mémoires de l’Académie de Berlin, année 1825) ; l’analyse de cette dissertation, par M. Pellat (dans la Thémis, tom. IX, pag. 62-87) ; le Cours de M. Guizot, tom. IV, leçons 7 et 8, de l’année 1830, pag. 233-282. — Perreciot a consacré aux colons un article assez étendu dans son ouvrage intitulé : De l’État civil des Personnes (tom. I, pag. 98-100, in-4o) : mais il s’écarte des auteurs qui précèdent, en distinguant, avec plusieurs autres savans, les adscripticii des coloni.
  2. Si quis inquilinos sine prædiis, quibus adhærent, legaverit, inutile est legatum. (Digest., XXX, 1, 112.) — Si quis inquilinum vel colonum non fuerit professus, vinculis censualibus tenetur. (Ibid., L, XV, 4, § 8.) — L’inquilinus était de la même condition que le colon.