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sauvages voisins du nord ; ces guerres ont pour motif la vengeance du meurtre du Siavesch. L’expiation du sang par le sang est le principe des mœurs et des sentimens héroïques de la Perse, comme des mœurs et des sentimens germaniques.

Un fils d’Afrasiab est fait prisonnier par les Iraniens. Le jeune prince, menacé de la mort, s’écrie qu’il a été l’ami de Siavesch, qu’il a pleuré son malheur et maudit ses meurtriers. Saisi de pitié, un guerrier va porter ces paroles à Rustem ; mais celui-ci, indigné, s’écrie : « Tu songes peu au sang du noble fils de Kaous. Il faut qu’un chagrin profond soit préparé pour le cœur d’Afrasiab, une peine qui ne s’épuise jamais. »

Au milieu de ces interminables combats se dessine la grande figure de Rustem. Outre la guerre générale, il accomplit encore d’autres exploits qui lui sont particuliers ; telle est sa singulière aventure avec le div Akwan. Celui-ci saisit Rustem et l’enlève dans les airs, après quoi il lui demande s’il préfère être jeté dans l’océan ou précipité sur la terre. Rustem, qui comprend la malice du mauvais génie, choisit la terre, sachant bien que ce sera pour son ennemi une raison de le laisser tomber dans la mer. C’est ce qui arrive en effet ; mais le héros tire son glaive de la main droite pour écarter les monstres marins, tandis qu’il nage du bras gauche, et gagne ainsi le rivage.

La fin de Khosrou ne ressemble exactement à aucune des différentes versions de la mort de Cyrus, telles que la racontent les auteurs anciens ; mais, légende pour légende, celle-ci est belle et touchante.

Après soixante années de règne, Khosrou est saisi d’une pensée triste. « Jusqu’ici j’ai été juste, mais si j’allais devenir comme Zohak, Tour ou Kaous. » Poursuivi par cette crainte, il demande à Dieu de l’ôter de ce monde. L’ange Serosch lui apprend dans un songe que son vœu a été exaucé. Alors le roi rassemble ses guerriers, leur partage ses trésors, nomme un successeur, et se met en route vers la montagne sur le sommet de laquelle il doit disparaître. Tout le peuple pleure son roi et veut le suivre ; Khosrou invite ceux qui l’accompagnent à retourner dans leur patrie. Un petit nombre de braves demeure. Il leur dit adieu durant la nuit ; et, quand l’aurore paraît, ils ne trouvent plus leur roi au milieu d’eux. Mais nul de ceux qui ont été témoins de sa disparition merveilleuse ne doit revenir parmi les hommes ; surpris par une tourmente, tous périssent, ensevelis sous la neige.

Ce dénouement semble une altération de la tradition que rapporte Hérodote, et selon laquelle Cyrus aurait péri au-delà de l’Oxus, pen-