Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 19.djvu/56

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
52
REVUE DES DEUX MONDES.

FAUSTINA, riant aux éclats.

Ah bien ! oui, mademoiselle ! Tu serais un grand sot, mon pauvre Astolphe !…

ASTOLPHE.

Ris tant que tu voudras ; si je pouvais t’appeler mademoiselle, je t’aimerais peut-être encore.

FAUSTINA.

Et j’en serais bien fâchée, car ce serait un amour à périr d’ennui. (À Gabriel.) Est-ce que cela vous amuse, l’amour platonique ? (À part.) Vraiment, elle rougit comme si elle était tout-à-fait innocente. Où diable Astolphe l’a-t-il pêchée ?

ASTOLPHE.

Fausta, tu crois à ma parole d’honneur ?

FAUSTINA.

Mais, oui.

ASTOLPHE.

Eh bien ! je te jure sur mon honneur (non pas sur le tien) qu’elle n’est pas ma maîtresse, et que je la respecte comme ma sœur.

FAUSTINA.

Tu comptes donc en faire ta femme ? En ce cas, tu es un grand sot de l’amener ici, car elle y apprendra beaucoup de choses qu’elle est censée ne pas savoir.

ASTOLPHE.

Au contraire, elle y prendra l’horreur du vice, en vous voyant, toi et tes semblables.

FAUSTINA.

C’est sans doute pour lui inspirer cette horreur bien profondément que tu m’amenais ici avec des intentions fort peu vertueuses ? Madame… ou mademoiselle… vous pouvez m’en croire, il ne comptait pas vous trouver sur ce sofa. Je n’ai pas de parole d’honneur, moi, mais monsieur votre fiancé en a une ; faites-la lui donner !… qu’il ose dire pourquoi il m’amène ici ! Or, vous pouvez rester ; c’est une leçon de vertu qu’Astolphe veut vous donner.

GABRIEL, à Astolphe.

Je ne saurais souffrir plus long-temps l’impudence de pareils discours ; je me retire.

ASTOLPHE, bas.

Comme tu joues bien la comédie ! On dirait que tu es une jeune lady bien prude.