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gistrats[1], que, quand un particulier obtenait l’autorisation de faire les frais d’un spectacle, il devait, pour y présider, revêtir les insignes de la magistrature à laquelle ce privilége était attaché[2].

Lors donc qu’à Rome un poète avait achevé un drame, il lui fallait, pour être joué, faire, avant tout, accepter son œuvre à celui qui faisait les frais du spectacle, puis obtenir l’autorisation du magistrat qui présidait les jeux et qui était quelquefois, mais non pas constamment, celui-là même qui faisait les frais.

À présent que nous savons à qui un poète grec ou romain présentait sa pièce, et qui avait qualité pour la recevoir, il nous faut examiner si quelque chose, dans ce mode de présentation et de réception, ressemblait à ce que nous appelons comités de lecture et censure théâtrale.

COMITÉS DE LECTURE.

Nous avons vu que la première démarche qu’avait à faire un poète dramatique en Grèce, était de demander un chœur. Tous n’obtenaient pas d’être choisis par un chorège et une tribu. Les auteurs malheureux ou inhabiles, tels que Morsimus et Mélanthius, que raille Aristophane, trouvaient malaisément ou même ne trouvaient pas de chœurs. D’autres n’obtenaient qu’une seule fois, dans toute leur carrière, cette faveur tant désirée[3]. « Les tribus d’Athènes, dit un scholiaste de Platon, se déterminaient dans le choix de leurs didascales, soit par la réputation qu’ils avaient acquise dans de précédens concours, soit par l’examen de l’ouvrage qu’ils présentaient[4]. » Tâchons de découvrir comment se faisait cet examen.

Il est naturel de supposer que, quand un ou plusieurs poètes offraient leur ouvrage à une tribu, on recourait à une lecture et peut être à une représentation d’essai. Nous ne connaissons, il est vrai, d’autres traces de ces lectures préalables que le récit qu’Apulée nous a laissé de la mort du poète Philémon. D’après ce récit, Philémon fut trouvé sans vie dans sa maison, tenant à la main le manuscrit d’une comédie récemment achevée, tandis qu’un nombreux auditoire l’attendait au théâtre pour entendre la lecture de sa pièce, qu’une averse avait interrompue la veille[5]. Comme, du temps de

  1. Augustin., Confess., lib. I, cap. X.
  2. Cicer., De legib., lib. II, cap. XXIV.
  3. Aristop., Ran., v. 94, seq.Schol., ibid.
  4. Schol., in Plat. rem public., lib. II, pag. 152, ed. Ruhnk.
  5. Apul., Florid., lib. III, § 16, tom. II, pag. 65, ed. Oudend.