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DÉPÊCHES DU DUC DE WELLINGTON.

pour l’affaire du roi, il lui faut non seulement les vœux et les bras de son peuple, mais encore, pour avoir ceux-là, toute la force que l’armée alliée peut faire marcher à son secours. » Cette lettre révèle le désir que lord Wellington avait de réunir tous les contingens et d’attaquer avant l’assemblée du Champ-de-Mai, qui devait, selon lui, exciter l’enthousiasme populaire, car il ne pouvait prévoir l’effet de l’acte additionnel. On voit qu’il croyait à la possibilité d’écraser une révolution militaire, mais qu’il n’eût pas jugé prudent de marcher sur la France si elle avait été soulevée par un mouvement national. C’est une vérité que lord Wellington aurait eu peine à faire comprendre à son noble correspondant, car le duc de Blacas ne l’a pas encore apprise à cette heure. Elle explique en même temps la facilité que le prince de Talleyrand trouva à Londres, en 1830, pour faire reconnaître le gouvernement de juillet, quand lord Wellington était à la tête du cabinet tory.

M. de Blacas ne se lassait pas d’insister sur l’entrée d’un corps de troupes étrangères en France, et le duc de Wellington de lui adresser de nouveaux refus. « Le retard de l’arrivée des troupes est malheureux, écrivait-il au ministre de Louis XVIII, un mois avant la bataille de Waterloo, mais on ne peut pas faire arriver des troupes de l’Amérique, du fond de la Gallicie et de la Pologne d’un côté, et de Lisbonne de l’autre, sans qu’il se passe du temps. » Le duc de Wellington et M. de Blacas s’entendaient également mal ensemble sur les places fortes. Lord Wellington mettait une grande différence entre la reddition d’une place forte par sa population ou par son commandant qui la livrait à l’ennemi. Dans le premier cas, il voyait un accroissement de forces ; dans l’autre, un affaiblissement, car ce qu’il redoutait surtout en France, et on l’a vu par toutes ses lettres, c’était le soulèvement de la population. Or, M. de Blacas, qui était en mesure de proposer beaucoup de marchés, exécutables ou non, avec les commandans des places fortes, ne pouvait répondre nulle part des populations, et il oubliait sans cesse ce que lord Wellington, dans sa prudence, ne perdait pas un moment de vue, la puissance de l’ennemi qu’ils allaient avoir à combattre.

Tandis que Dumouriez demandait, malgré son grand âge, une place au quartier-général de Bruxelles, en même temps que le paiement de la pension que lui faisait l’empereur d’Autriche, tandis que M. de Blacas sollicitait le général en chef des armées étrangères de franchir la frontière de la France, celui-ci avait à combattre ailleurs des scrupules dont je retrouve, avec fierté pour notre pays, l’honorable ex-