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DU GOUVERNEMENT REPRÉSENTATIF EN FRANCE.

britanniques était proche. Un homme, que la nature passionnée de son génie engagea aussi ardemment qu’aucun autre dans ces débats, Édmond Burke, n’hésite pas à reconnaître que la révolution française était nécessaire pour rendre à la vieille constitution son ressort presque brisé et son autorité compromise aux yeux des peuples.

Et cependant, monsieur, on ne vit pas en ce temps-là les plus implacables rivalités aller à ce point d’accepter le concours de factions placées en dehors des institutions nationales. Durant les luttes même les plus violentes du XVIIIe siècle, tous les orateurs du parlement, tous les écrivains de la presse, et je n’en excepte ni Wilkes lui-même, ni votre Junius, à la parole aiguë et pénétrante comme une lame de poignard, tous les hommes engagés dans les affaires, enfin, professaient pour elles un respect profond. Le puritanisme républicain de Cromwell était sans organe à Westminster ; aucun hommage public, aucun vœu même secret n’allait par-delà les mers saluer une royauté absente. La guerre aux portefeuilles n’ébranlait pas une dynastie déjà vieille de plus d’un siècle, et que les circonstances, autant que l’esprit du pays, dégageaient de toute solidarité dans les évènemens.

En France, un pouvoir plus faible et plus découvert a rencontré des adversaires moins scrupuleux ; aussi la foi dans l’avenir s’est-elle trouvée ébranlée là où elle commençait à peine à naître. Le terrain conquis à si grand’peine au dedans et au dehors s’est trouvé perdu sans que les hommes de bonne foi pussent ramener à une question précise les griefs sans nombre de l’opposition, et dégager une idée politique parfaitement nette de sa phraséologie abondante.

L’épreuve de la dissolution, qui eût été probablement décisive en Angleterre, ne rendit pas la position plus simple ; car la France, peu fixée sur la portée de l’appel qui lui était adressé, ne fit pas une réponse assez catégorique pour lever les embarras d’une situation dont le vague même constituait le danger. Si le résultat des élections générales constata que la majorité du corps électoral était entrée dans la coalition, il fut évident, d’un autre côté, que cette majorité s’était formée par des motifs non moins disparates que ceux auxquels cette ligue avait dû sa naissance au sein de la chambre et de la presse. Deux partis faibles en nombre, et placés en dehors de la constitution actuelle par les espérances qu’ils poursuivent, avaient fait presque partout l’appoint des majorités. Il était difficile de saisir, au sein de l’opinion dynastique constitutionnelle dont Paris offre peut-être l’image la plus complète et la plus vraie, une pensée à