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entière, et toutes choses renvoyées à un concile, s’adoucirent sur leurs différends, et se rallièrent à une déclaration dont tous les points étaient également contestés. Et ce fut en quelque sorte du consentement de tous que Mélancthon, après tant de travail pour la faire reconnaître des catholiques, se chargea d’en écrire l’apologie en réponse à la réfutation que l’empereur en avait fait dresser. « Je me tiens enfermé chez moi, écrit-il à Camérarius, à cause des calomnies, et j’écris l’apologie avec soin et véhémence, pour la produire au besoin[1]. » Il se préparait la matière d’autres calomnies et de nouveaux périls.

L’empereur, quoique porté à une rupture, par lassitude autant que par l’entraînement de ses conseillers, et l’instigation de quelques cours, hésitait encore. On était à la fin de septembre. L’électeur de Saxe ayant fait partir ses bagages et sa bouche, l’empereur lui demanda un délai de trois jours. Mais qu’était-ce qu’un si court intervalle pour se décider, soit à accorder le libre usage de la doctrine en retenant la juridiction épiscopale, ou à tout renvoyer à un concile, soit enfin à remettre en vigueur les édits de Worms ? L’électeur, qui n’espérait plus depuis long-temps que le premier parti prévalût, et pour qui les deux autres étaient une rupture, après avoir donné ce dernier gage de bonne volonté, retourna dans ses états. Tous les princes et députés des villes en firent autant, et la diète fut close. Tout le monde emportait en se retirant ou l’espoir ou la crainte de la guerre. Le retour aux édits de Worms, qui paraissait devoir en être la déclaration immédiate, n’en fut, à cause des évènemens qui survinrent, que la menace pour l’avenir.

VIII. — PRÉPARATIFS DE GUERRE. — MÉLANCTHON EST APPELÉ EN FRANCE PAR FRANÇOIS Ier.

L’effet de la diète d’Augsbourg fut de fortifier deux ligues qui, d’ailleurs, existaient déjà, mais plus en projet qu’en action : la ligue d’Augsbourg formée par les catholiques, et la ligue de Smalcalde formée par les protestans. La première commença les hostilités en élisant roi des Romains, sans le concours des princes réformés, Ferdinand, frère de Charles-Quint. La ligue de Smalcalde protesta contre cette élection. Dès-lors, les préparatifs de guerre se firent ouvertement. L’électeur de Saxe consulta ses théologiens sur la légitimité

  1. Corp. ref., tom. II, no 908.