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REVUE. — CHRONIQUE.

mollement de quelques velléités de changement et de réforme, et nommer des commissions ?

Ce serait une erreur. Les apparences sont trompeuses.

Il y a aujourd’hui dans toutes les situations, dans celle du ministère comme dans celle des chambres, dans celle de l’opposition, ou, à mieux dire, des oppositions, comme dans celles des partis gouvernementaux ; il y a, dis-je, quelque chose d’artificiel, de factice, nullement conforme à la marche régulière de nos institutions.

À qui la faute ? À tout le monde. Quelqu’un prétend-il être exempt de tout reproche ? Qu’il se lève et qu’il ose plaider non coupable. Où trouvera-t-il un jury qui l’acquitte ? pas même parmi ses amis.

Ce qu’on peut dire pour la défense des hommes, c’est que nul n’a été complètement le maître de sa position, que chacun a été plus ou moins fortement entraîné par les circonstances.

Il serait trop long de montrer aujourd’hui l’origine et le développement de ces fausses situations. Bornons-nous à signaler le fait ; quant à sa réalité, il suffit d’en appeler à la conscience publique.

Le ministère lui-même ne le contesterait pas. Il le sent, si je puis parler ainsi, en lui-même. Il reconnaît, après tout, que sa position manque de force et d’avenir. Cependant le cabinet n’est pas dépourvu d’hommes habiles ; il en est que tout ministère serait heureux d’avoir. D’où vient sa faiblesse ? De la situation et de l’arrangement.

Tout ce qui se dit, tout ce qui se fait depuis quelque temps, discours, écrits, tentatives, unions, ruptures, coalition, ministère du 12 mai, projets de réforme, tout, le bien comme le mal, n’est autre chose, à nos yeux, que l’effort d’une nature maladive, mais vivace, qui tend à se débarrasser des causes qui la vicient, et à retrouver le jeu régulier de ses organes.

Ne prenons pas les symptômes pour le mal, et ne cherchons pas le remède trop loin de nous, dans de chimériques fantaisies. Pour que tout, choses et hommes, rentre dans le vrai, il suffit de subordonner l’esprit au bon sens, et son amour-propre à l’avenir de la France.

C’est là en peu de mots le résumé et comme le bilan de la situation, telle qu’elle s’est formée depuis plus de six mois. Entrons maintenant dans les détails de la quinzaine.


En 1831, les paroles suivantes furent prononcées à la chambre des députés « L’extension de la capacité électorale est une conséquence de la charte nouvelle, car elle en est une promesse, et la charte de 1830 tiendra les siennes. Il nous a paru fondé sur la nature des choses et de notre gouvernement de confier au plus grand nombre possible de citoyens les droits politiques. Nous avons donc cherché à étendre les capacités électorales, en les demandant à tout ce qui fait la vie et la force des sociétés, au travail industriel et agricole, à la propriété et à l’intelligence. La propriété et les lumières sont donc les