Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 20.djvu/517

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
513
UN VOYAGE EN CHINE.

tion chinoise. La masse des articles importés en 1837 se composait de riz pris à Batavia et à Manille, de poivre de Sumatra, d’opium de Bengale ou de piastres espagnoles.

Y a-t-il donc des obstacles insurmontables qui nous rendent la concurrence impossible ? Est-il absolument reconnu que toute voie à une réforme commerciale nous soit à jamais fermée ? Non, certes. Ce n’est pas au moment même où notre industrie étonne le monde par ses progrès, où la science lui prête avec tant d’avantages son puissant appui, que j’oserais soutenir une pareille assertion. Les vérités de haute économie politique commencent à se faire jour chez nous ; il s’opère, en France, depuis quelques années, un grand mouvement commercial et industriel, que le gouvernement seconde de tous ses efforts ; notre industrie cherche à sortir des limites que les circonstances de notre vie politique lui ont tracées depuis un demi-siècle. Il ne lui faut dorénavant que de l’expérience et une bonne direction ; il faut surtout, pour que nous puissions arriver à des résultats, que l’esprit d’association se développe chez nous, que nos villes manufacturières et leurs intermédiaires naturels, les ports de mer, se donnent la main et réunissent tous leurs efforts et toute leur puissance pour soutenir la lutte. — La tâche n’est pas au-dessus de leurs forces.

Les marchés de Chine leur offrent des débouchés importans. Pourquoi notre commerce et notre industrie ne fournissent-ils pas leur part de ces 15 millions de francs d’étoffes de laine que les Anglais vendent tous les ans aux Chinois ? Sommes-nous, sur cet article, inférieurs à nos voisins ? Je ne le crois pas. Pourquoi nos étoffes de coton, notre horlogerie, n’iraient-elles pas rivaliser, en Chine, avec les articles similaires anglais ?

Ce que je dis de la Chine, je le dirais de toute l’Indo-Chine, si le cadre que je me suis tracé me permettait de m’étendre sur ces importantes questions. Je me contenterai de dire que toute cette partie de l’Inde nous offre d’immenses débouchés où nous pouvons écouler l’excédant des produits de notre mouvement industriel, où notre navigation peut trouver les élémens d’un commerce considérable. Mais, pour parvenir à ce but si important, il faut que nous abandonnions jusqu’à un certain point ce système de restriction et d’exclusion auquel nous avaient condamnés certaines nécessités politiques. Les temps et les exigences ne sont plus les mêmes. Pourquoi resterions-nous dans une voie fausse dont l’expérience nous démontre tous les jours les inconvéniens ?

Il y a une vérité qui, Dieu merci, est aujourd’hui bien connue de nos hommes d’état, c’est qu’il n’y a pas de commerce possible sans échanges. C’est le défaut de cet élément indispensable qui est la cause principale de notre infériorité commerciale dans les contrées éloignées. Comment nos navires peuvent-ils aller porter les produits de notre industrie dans l’Indo-Chine, s’il leur est de toute impossibilité d’y trouver des frets de retour ? Un voyage commercial se compose de l’aller et du retour ; chacune de ces deux périodes doit donner ses bénéfices. Or, si le retour, au lieu d’être profitable à une opération, augmente ses charges de 40 à 50 pour cent, comment pourra-t-elle sou-