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DU GOUVERNEMENT REPRÉSENTATIF EN FRANCE.

moderne par les sectes diverses séparées du centre de l’unité catholique. L’église à laquelle vous appartenez, par exemple, a uni, par des nœuds tellement indissolubles, ses intérêts politiques à ceux de l’aristocratie territoriale, qu’un changement organique dans la constitution de l’un de ces pouvoirs entraînerait pour l’autre des conséquences immédiates autant que graves. Je n’ai rien à apprendre sur ce point à l’homme qui réclame avec tant de persévérance et d’énergie des changemens fondamentaux dans l’organisation de l’établissement épiscopal, comme une conséquence directe et nécessaire du principe de réforme posé en 1832. Vous savez mieux que moi quelle solidarité lie vos barons et vos évêques, et vous n’ignorez pas que votre docteur Philpott, par exemple, est un peu plus préoccupé des bills soumis à la chambre que du salut des brebis d’Exeter commises à sa houlette pastorale. Vos révérends prélats sont des hommes très savans, d’excellens pères de famille très respectables à tous égards ; mais il y aurait plus que de la bonhomie à voir en eux les chefs d’une hiérarchie ecclésiastique, dans le sens spirituel de ce mot. La religion anglicane ne saurait, d’ailleurs, se comprendre en dehors des domaines de sa Majesté Britannique qui en est le chef suprême ; comme la plupart des établissemens protestans en Europe, elle fut conçue par le pouvoir dans le sens de ses convenances ; ce fut un puissant élément pour la nationalité anglaise plutôt qu’un lien pour la conscience des peuples. Un établissement qui lutte avec une telle énergie contre les passions du siècle en même temps que contre les conséquences logiques du droit d’examen proclamé par lui, ne manque assurément pas de grandeur ; mais on doit bien plus la chercher dans les intérêts qu’il consacre, que dans les doctrines qu’il professe.

Tel est le sort de toutes les institutions religieuses dont le pouvoir politique s’est constitué le chef en s’interposant entre le ciel et la conscience humaine. L’église grecque nous est, en dehors du protestantisme, un éclatant exemple de ce que seraient devenues la foi chrétienne et la dignité de l’homme, si, dans la lutte du moyen âge, l’élément intellectuel, s’appuyant au centre de l’unité catholique, n’avait triomphé de la puissance militaire. C’est parce qu’elle a matérialisé l’idée religieuse, en substituant le sabre des autocrates à la tiare des pontifes, que la religion grecque est devenue la religion du despotisme ; c’est parce que nulle pensée de liberté ne saurait fleurir à son ombre, qu’on aspire à l’introduire comme un germe de mort au sein d’un peuple généreux, sur l’avenir duquel on ne sera pas sans souci, tant qu’il élèvera les mains vers une autre puis-