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MÉLANGES D’HISTOIRE NATURELLE.

deux divinités étaient près de se livrer bataille, lorsque Siwa apparut et empêcha le combat. Vishnou alors se transforma en sanglier, et, descendant le long du lotus, il arriva à Patal ; Brahma, de son côté, prit la forme d’une oie, et, se dirigeant du côté opposé, il finit par gagner le monde d’en haut.

Le lotus rose tel que le connaissent les hommes, quoique ne pouvant être considéré que comme un chétif représentant de celui qui enfantait des dieux, est toujours, on le pense bien, quelque chose de respectable pour les Hindous ; mais il faut dire à leur louange que même quand ils le considèrent sous un point de vue purement profane, ils savent convenablement l’apprécier. Pour n’être pas rare dans leur pays, ce magnifique végétal ne perd rien de son prix à leurs yeux, et ils en font l’ornement des palais.

Les habitans de l’ancienne Égypte n’étaient pas moins sensibles que ceux de l’Inde moderne à la beauté du lotus, et Strabon nous apprend qu’un des plaisirs des voluptueux de cette époque était de se faire promener dans d’élégantes barques sur des lacs dont les eaux étaient couvertes de ces admirables fleurs. Il nous reste même la représentation d’une scène de ce genre où le lotus est figuré d’une manière très reconnaissable ; c’est dans la fameuse mosaïque de Palestrine, que j’ai déjà eu occasion de citer.

J’ai retrouvé une scène presque semblable sur un écran chinois que possède une personne de ma connaissance. La peinture, qui est exécutée avec beaucoup plus de correction et de délicatesse que nous ne sommes habitués à en trouver dans ces images de pacotille qu’on nous apporte de Canton, représente le parc d’un homme riche, avec ses pavillons de forme fantasque, ses bosquets de bambous, ses touffes de bananiers, ses ponts, ses ruisseaux. Sur le devant est une petite nacelle qu’une femme jeune et jolie pousse au milieu d’un méandre de lotus tandis que sa compagne se penche pour cueillir une de ces fleurs. Nous savons, au reste, par les récits des missionnaires, que, parmi les plantes d’agrément qu’on cultive dans le céleste empire, celle-là est une des plus estimées. Ses formes sont fréquemment reproduites par les artistes dans les ornemens des vases et des meubles. Je me rappelle en particulier avoir vu, dans un magasin du passage des Panoramas, un bassin d’airain remarquable par ses dimensions et par son élégance, qui était la représentation exacte d’une feuille de lotus.

Outre cette belle nymphéacée, les Chinois en ont une autre qui lui ressemble beaucoup au premier aspect, mais dont les botanistes ont