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AFFAIRES DE L’AFAGHANISTAN.

charge à son hôte, trouva enfin un exil paisible et du pain à Loudiana, où Shah-Soudjâ lui-même l’avait précédé.

De 1803 à 1809, Shah-Soudjâ avait occupé un trône mal affermi, et conclu à Peshaver, en 1809, un traité d’alliance avec le gouvernement suprême des Indes anglaises, qui, à l’effet de négocier ce traité, avait envoyé M. Elphinstone à la cour de Kaboul, en qualité d’ambassadeur. Cette même année, ce prince, qui n’avait pu réussir à rallier les Barekzaïs à sa cause, fut obligé de fuir devant le visir Fatteh-Khan, qui, déjà une fois, avait placé la couronne sur la tête de Shah-Mahmoud, et qui de nouveau exerça le pouvoir suprême en son nom, de 1810 à 1818. Shah-Shoudjâ avait trouvé dans le Pandjab un asile qui devait, trois ans plus tard, lui coûter si cher. Il fit de courageux mais vains efforts pour rétablir son autorité, d’abord dans la province de Peshaver, puis dans le Moultan, et enfin dans le Kashmir. Il fut forcé de repasser l’Indus en 1810, et une seconde tentative en 1811 eut pour résultat de le faire tomber entre les mains du gouverneur d’Attock sur l’Indus. Celui-ci le livra bientôt à son frère, gouverneur de Kashmir, d’où, après des dangers et des souffrances inouis, il parvint à s’échapper en 1812, et vint de nouveau demander l’hospitalité à Randjît-Singh. S’il ne restait plus au roi fugitif ni armée, ni ressources politiques, il lui restait encore, et Randjît-Singh le savait, des pierres précieuses d’une immense valeur, et une entre autres, le Koh-é-nour (montagne de lumière), ce diamant merveilleux qu’aucun souverain n’était assez riche pour acheter, et que la conquête ou le pillage pouvaient seuls faire changer de maître ! Du trésor de Golconde, il était passé au palais des empereurs mogols, du palais de Delhi à la tente de Nader-Shah, où, quand ce conquérant fut assassiné en 1747, Ahmed saisit le Koh-é-nour d’une main et la couronne de l’Afghanistan de l’autre. Randjît-Singh aspirait depuis long-temps à la possession du Koh-é-nour ; après avoir offert sans succès un djâghir (fief) avec une place forte pour la cession du trésor qu’il convoitait, il eut recours aux menaces, puis aux traitemens les plus insultans et aux persécutions les plus incessantes. Les tourmens de la captivité, de la faim, de la soif, tout fut mis en usage, et si Randjît-Singh s’arrêta devant l’assassinat, on peut croire qu’il ne fut retenu que par l’incertitude où il était sur les moyens employés par le shah pour soustraire le diamant aux recherches, et par la crainte que sa proie ne lui échappât à la mort de sa victime. Le shah, vaincu par la persévérance de son bourreau, et craignant non-seulement pour sa vie, mais encore pour l’honneur