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LE TEXAS ET SA RÉVOLUTION.

lieu de prouver la bonté de la cause, ne sont destinées qu’à faire comprendre à leurs concitoyens les avantages du succès. Leurs manœuvres dans le pays qu’ils veulent acquérir se manifestent ensuite par l’arrivée d’explorateurs qui s’y établissent la plupart, sous prétexte que leur résidence ne préjuge pas la question du droit de souveraineté. Ces pionniers excitent peu à peu des mouvemens qui troublent l’état politique du territoire en litige ; puis viennent des mécontentemens et des collisions calculés de manière à fatiguer la patience du légitime propriétaire, et à diminuer les avantages de la possession. Quand les choses en sont arrivées à ce point, ce qui est précisément le cas du Texas, alors commence le travail de la diplomatie. L’inquiétude qu’ils ont excitée dans le pays, les intérêts des nouveaux colons, les révoltes qu’ils provoquent parmi les aventuriers et les sauvages, l’obstination avec laquelle ils soutiennent leurs prétentions à la propriété du territoire, deviennent le sujet de notes où la modération et la justice ne sont respectées que dans les mots, jusqu’à ce que, grâce à des incidens qui ne manquent jamais de se présenter dans le cours de pareilles négociations, il se conclue un arrangement aussi onéreux pour une des deux parties que favorable à l’autre.

« Et quand les États-Unis ont réussi de cette façon à introduire leurs citoyens en majorité dans le pays qu’ils convoitent, ils profitent généralement, pour faire valoir leurs prétendus droits, du moment où leur adversaire est plongé dans les plus grands embarras. Telle est la politique dont ils ont commencé à user pour l’affaire du Texas. Leurs journaux se sont mis à discuter le droit qu’ils s’imaginent avoir à la souveraineté de cette province jusqu’au Rio-Bravo-del-Norte. On imprime et l’on répand de tous côtés de petits pamphlets sur la convenance de son acquisition. Il y a des gens qui proclament tout simplement que la Providence a fixé elle-même le Rio-Bravo pour limite respective des deux républiques, ce qui a fait accuser les États-Unis, par un auteur anglais, de vouloir rendre la Providence complice de leurs usurpations. Mais ce qui est bien remarquable, c’est qu’ils ont engagé cette discussion avec nous aussitôt qu’ils nous ont vus occupés à repousser l’invasion espagnole, dans la persuasion que nous ne pourrions de long-temps songer à aucun autre ennemi. »

On voit que le gouvernement mexicain comprenait parfaitement, dès cette époque, le danger dont il était menacé par la multiplication rapide des colons anglo-américains dans le Texas. Déjà leur dévorante activité étendait ses spéculations au-delà des bornes de cette