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LES SCIENCES EN FRANCE.

à leurs séances. Je me bornerai donc, pour celles-ci, à des considérations générales qui trouveront leur place ailleurs, et je m’étendrai particulièrement sur l’Académie des sciences, qui seule a accepté une entière publicité, et qui a dévoilé de cette manière tous les principes de son existence et tous les ressorts de son organisation.

Mais d’abord, comment l’Institut a-t-il perdu son unité ? comment une telle séparation s’est-elle opérée ? Sous la république et sous l’empire, les différentes classes de l’Institut (c’est le nom qu’elles avaient alors) formaient un tout indivisible. À la restauration, quelques membres de la classe de langue et de littérature française, se rappelant qu’ils étaient les héritiers légitimes de messieurs les quarante réclamèrent les entrées au château, dont jouissaient leurs prédécesseurs, et voulurent se séparer de leurs confrères trop bourgeois. Cette affaire souleva de vives discussions, et ce fut avec peine que, tout en consacrant le principe du rétablissement des anciennes académies (l’Académie française, celle des inscriptions et belles-lettres ; l’Académie des sciences et celle des beaux-arts), le nom d’Institut fut conservé malgré l’opposition de quelques personnes qui tentèrent d’effacer jusqu’à ce dernier reste d’origine républicaine. En même temps, la restauration commit la faute énorme de chasser de l’Institut des savans célèbres auxquels on substitua, par ordonnance, des hommes qui eurent la faiblesse d’accepter une position indigne de leur talent. L’attitude de l’Académie française, les tentatives criminelles d’un gouvernement qui, redoutant partout le principe d’élection, voulait diriger le choix de l’Institut, et refusait même quelquefois de sanctionner les élections qui lui déplaisaient, obligèrent l’Académie des sciences, un peu délaissée par ses sœurs, à chercher une défense dans ses propres forces, dans la conscience de son utilité, dans la faveur dont elle jouissait auprès du public, et dans tous les moyens que lui offrait alors le mouvement libéral qui s’opérait parmi nous.

Le plus puissant de ces moyens, ce fut la publicité. D’après les réglemens, les séances ordinaires de toutes les académies de l’Institut étaient secrètes. L’Académie des sciences n’admettait que des étrangers célèbres momentanément à Paris, et les personnes dont les travaux avaient été approuvés et jugés dignes de paraître dans le recueil des Savans étrangers. Cet auditoire peu nombreux, mais choisi, était composé d’hommes capables de comprendre les lectures et de suivre les discussions, et c’est parmi eux que l’Académie se recrutait d’ordinaire quand elle éprouvait quelque perte. Un tel