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embarras par deux ou trois à parte à l’usage du parterre de Florence, mais que nous ne traduirons pas ici.

Un évènement imprévu vient subitement le tirer de cette situation délicate. On entend un grand bruit à la porte de la chambre de la princesse. — Ciel ! c’est mon mari, j’ai reconnu sa voix s’écrie celle-ci. — Le prince ! — Oui, mon cher Stentarello, le prince lui-même ! grand Dieu ! que va-t-il faire s’il te trouve ici, à cette heure ; point de doute, il va nous tuer ! — Il va me tuer ! — Oh ! oui, cache-toi ! — Où me cacher ? — Dans ce coffre. — Et Stentarello se précipite dans un coffre placé dans l’un des coins de la chambre, et où la princesse le pousse et le fait entrer de force.

Le côté de ce coffre qui regarde le théâtre est enlevé de façon à ce qu’on ne perde rien du jeu de l’acteur qui y est caché.

Le prince fait grand bruit en arrivant ; il sait que sa femme le trompe et que son amant était en tête-à-tête avec elle ; s’il découvre le coupable, il a inventé un supplice dont César Borgia eût été jaloux. En disant ces mots, il jette son épée sur le coffre, Stentarello bondit.

— J’ai entendu du bruit de ce côté, s’écrie le prince.

— Ce sont les rats, répond la princesse.

Stentarello joint les mains et lève les yeux au ciel avec une angélique expression de reconnaissance.

— Oh ! oui, j’ai trouvé un nouveau genre de supplice, un supplice qui vient des Turcs ; on suspend le coupable à une poulie au-dessus d’un pieu de fer, et puis on lâche la poulie… C’est le pal !

Stentarello tremble si fort, qu’il fait crier les planches du coffre.

— Mais tous les rats du logis se sont donc donné rendez-vous dans ce maudit coffre ! Voilà, sur ma parole, une belle occasion de les détruire d’un seul coup ; l’Arno coule sous cette fenêtre, il faut jeter ce vieux coffre dans l’Arno.

Le prince s’approche du coffre et essaie de le soulever. Stentarello voudrait sortir et pousse le couvercle, qui en retombant lui écrase les doigts ; il pousse un cri aigu.

— Voilà des rats qui ont la voix de chrétiens. En disant ces mots, le prince soulève le couvercle du coffre et découvre Stentarello, qui se blottit et se cache la tête à la façon de l’autruche, espérant par ce moyen ne pas être vu ; la princesse, de son côté, feint de s’évanouir.

— Quel rat ! mais, par Bacchus, c’est Stentarello en personne. Ah ! ah ! don Stentarello caché dans la chambre de ma femme ; holà, compagnons ! — Quatre hommes arrivent et s’emparent de Stentarello,