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lousses, se composent de tous les spihn zerahs. Les djirgas des malliks n’admettent que leurs subordonnés, les moushirs, et les djirgas des khans ne sont composées que de malliks. Dans toute affaire concernant la tribu entière, et devant être réglée par la décision de tous les chefs de famille, on prend les voix de la manière suivante : les spihn zerahs interrogent les chefs de familles qui leur sont subordonnés. Ils se rendent ensuite à l’assemblée des moushirs. Les moushirs forment le conseil privé des malliks, qui sont le dernier et le seul organe par lequel le khan apprenne la volonté de sa tribu. Les affaires courantes ne passent pas à travers cette filiation des assemblées populaires, et sont décidées ou réglées par le khan lui-même ou par ses subordonnés. En examinant cette organisation de près, il est impossible de ne pas se croire transporté au milieu de ces anciennes tribus germaines réglant toutes leurs affaires par leurs villages (gauen), leurs bourgs (marken) et leurs centines (zehenten). Les chefs des gauen furent également élus par le peuple et parmi les chefs de familles. Les centeni singulis ex plebe comites, qui formaient le conseil du prince, correspondent bien aux djirgas du khan.

Les djirgas exercent aussi un pouvoir judiciaire, et leur intervention, en général conciliatrice, substitue par degrés, aux habitudes sanglantes de vengeance, l’idée d’une proportion équitable et régulière entre la peine et le délit. Les Afghans seuls jouissent de tous les droits consacrés par les djirgas ; ils sont, à peu d’exceptions près, les seuls propriétaires et citoyens dans le pays. Les peuples qui leur sont soumis n’ont, au contraire, aucun droit de propriété sur les terres qu’ils habitent. Le pays entier est divisé entre les différentes tribus, de manière que chacune d’elles possède un district à elle seule.

Parmi quelques tribus des Afghans orientaux, l’occupation territoriale suit, comme chez les anciens Germains, un tour de rôle ; c’est le sort qui en décide. Le tirage des lots se fait à des époques périodiques et de manière à ce que les terres les plus fertiles puissent changer de mains. Cette opération s’appelle waish. Dans la tribu des Youssouf-Zaïs, elle a lieu tous les dix ans.

Les Afghans ne cultivent pas toutes les terres qui leur échoient en partage, ni ne les font cultiver par leurs colons, mais ils en abandonnent une grande partie aux peuples vaincus. Ces derniers sont partagés en plusieurs catégories pareilles à celles qui existaient parmi les esclaves des anciens Germains.

Les relations des Afghans avec les habitans reçus par octroi ne sont pas moins dignes d’attention. À cette classe appartiennent non-