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priétés, des esclaves et des bêtes de somme dont les Mexicains s’étaient emparés, l’échange des prisonniers et la mise en liberté de Santa-Anna, étaient stipulés par le traité patent ; par le traité secret, Santa-Anna prenait l’engagement de ne pas reparaître à la tête des troupes mexicaines contre le Texas pendant la présente guerre, et à ne rien négliger pour que le gouvernement de Mexico reconnût l’indépendance du Texas.

Ces deux traités furent très impopulaires ; l’armée, qui brillait beaucoup plus par le courage que par la discipline, continuait à demander la mort de Santa-Anna, en représailles du massacre de Goliad. Partout on se défiait de la sincérité et des intentions du président mexicain ; on ne voulait pas voir que cette malheureuse campagne l’avait perdu pour long-temps dans l’opinion de ses compatriotes, et qu’une fois de retour à Mexico, il ne serait pas tenté de recommencer la guerre. Quoi qu’il en soit, il fallut renoncer à l’embarquer pour Vera-Cruz ; au jour fixé pour son départ, une émeute de soldats éclata à Velasco, et le pouvoir exécutif, hors d’état de maîtriser l’effervescence générale, se décida, le 4 juin, à différer sa libération. Peu après, l’armée manquant de tout et se croyant négligée par le gouvernement, entreprit de lui forcer la main ; elle envoya un de ses officiers à Velasco, pour exiger l’adoption de certaines mesures, et cet officier, mécontent de l’accueil qu’on lui fit, essaya d’arrêter le président, qui fut heureusement défendu, dans cette crise, par les citoyens de Velasco. De pareils faits sont, dans toutes les révolutions, le revers de la médaille ; l’enfantement de l’indépendance des États-Unis en a présenté un grand nombre. La révolution du Texas ne pouvait pas en être exempte. Le caractère turbulent de la population, la composition de l’armée, le désordre des finances du nouvel état, l’inévitable confusion de tous les élémens administratifs, ne permettaient pas d’espérer que la république naissante échappât entièrement à ces perturbations passagères. Santa-Anna crut devoir protester contre sa captivité. Le président lui répondit que les circonstances avaient nécessité la mesure prise à son égard ; que, du côté des Mexicains, il y avait eu bien des infractions au traité ; que d’ailleurs il se plaignait à tort des privations qu’il endurait ; qu’elles étaient partagées par les premiers personnages de la république. « J’ai sacrifié à votre bien-être celui de ma famille malade, ajoutait M. Burnet. Si nous manquons de comfort, c’est à votre visite chez nous que votre excellence doit s’en prendre, et il nous paraît tout simple qu’elle souffre un peu de nos maux. »