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RÉFLEXIONS POLITIQUES.

souhaiterions, nous, le maintien intégral dans l’intérêt même de la presse, sont un drapeau qui fut levé dans un moment critique. Après la révolution de juillet, la presse s’était établie sur les marches du trône ; elle les gravissait sans cesse pour y porter ses sommations ; la législation de septembre fut un coup de canon tiré sur les plus hardis. Les blessés sont morts, le monde a marché, et la presse a repris à peu près son allure, sans se hasarder toutefois à attaquer si ouvertement ce que la constitution et l’intérêt général commandent de respecter. L’arme est restée au pied du trône et devant les institutions, il est vrai ; mais s’en sert-on réellement dans ces temps plus calmes ? Exécute-t-on sévèrement les lois de septembre ? Telles qu’on les applique aujourd’hui, elles ne suffiraient pas dans un temps de troubles, et le ministère du 1er  mars, qui n’aimerait, sans doute, pas plus qu’un autre à se désarmer, sait bien qu’il n’affaiblira pas le gouvernement en remettant une partie des délits de la presse au jugement du jury.

§ IV.

Revenons aux cabinets de l’Europe. On n’a pas espéré, sans doute, que l’Europe absolue tendrait les bras au gouvernement de juillet, et nous avons rappelé plus haut que son mauvais vouloir à l’égard de la France, révolutionnaire ou non, ne date pas d’hier. Nous avons montré tout à l’heure quelle a été son attitude depuis cinquante ans. On l’a vue :

Alliée tout entière, à Augsbourg et en 1701, contre le roi de France ;

Alliée de nouveau, en 1790, contre la révolution française, c’est-à-dire contre la France elle-même ;

Réunie encore, en 1813, contre le souverain de la France, mais déclarant en même temps qu’elle combattait contre Napoléon et non contre la France, et qu’elle désirait plutôt voir la France grande, forte et heureuse, parce que la puissance française est une des bases de l’édifice social de l’Europe[1].

On voit ensuite l’Europe revenir sur cette déclaration et menacer la France des projets les plus sinistres, quand les idées de propagande y apparaissent avec le général Lafayette et le parti qui força Napo-

  1. Déclaration des puissances alliées.