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il n’en est pas ainsi : plusieurs de ces races se refusent à de semblables rapprochemens, et vivent isolées par leurs mœurs, leur langage et leurs caractères physiques. D’ailleurs, les Hindous et les Musulmans se subdivisent eux-mêmes en un grand nombre de populations qui ne diffèrent pas moins les unes des autres que bien des nations de l’Europe entre elles. Il serait difficile de dire quelle est dans l’Hindoustan la proportion des Hindous aux Musulmans, les relevés étant fort incomplets jusqu’à ce jour ; mais nous pensons qu’on peut évaluer à une vingtaine de millions la population musulmane répandue dans toute l’Inde anglaise, y compris le Pandjâb et l’Afghanistan. Les Hindous proprement dits, appartenant à diverses sectes de la religion brahmanique, peuvent s’élever à 50 millions, dont 30 millions au moins habitent la présidence du Bengale. Le boudhisme compte peut-être dans toute l’Inde anglaise 2 à 3 millions de prosélytes, dont la population de Ceylan forme la moitié ; les autres croyances, dont quelques-unes participent à la fois de l’islamisme et du brahmanisme, et dont d’autres ne paraissent avoir aucun point de contact avec ces religions, se répartissent entre une quantité prodigieuse de tribus. Pour donner une idée de l’immensité du champ que l’ethnographie aura à parcourir pour rassembler seulement les matériaux des importantes recherches qu’elle est appelée à faire dans l’Hindoustan, nous remarquerons, avec l’historien du Radjpoutana[1], qu’en suivant le cours de la rivière Tchamboul sur un développement d’environ 500 milles, on traverse des royaumes, principautés, petites républiques., etc, formés des races suivantes : Soundies, Tchanderawats, Siesoudias, Aaras, Gore, Djadoune, Sikerwal, Goudjeur, Djât, Touar, Tchohâne, Bhadoria, Katchwaha, Sengar, Bondéla, etc. Toutes ces races diffèrent plus ou moins par leurs caractères physiques, leurs mœurs, leurs coutumes, leurs occupations ordinaires et leurs langages[2]. La taille, le teint et la physionomie des Hindous et même des Musulmans de l’Inde sont si variés, qu’aucune descrip-

  1. James Tod, Annals and antiquities of Rajast’han. London, 1832, 2 vol. in-4o.
  2. Les deux langues-mères de l’Inde paraissent être le sanscrit et le tamoul, l’une d’où semblent dériver tous les principaux dialectes de l’Inde septentrionale (principalement au nord de la rivière Krishna), tels que le bengali, le mahratta, le hindi, le pandjabi, etc. ; l’autre, qui aurait donné naissance au tamil, malayalam, telenga, canarais, talava, etc. Le bengali est parlé par 30 millions d’hommes qui peuplent le système inférieur du Gange ; l’hindoustani avec ses dialectes est parlé par environ 20 millions et compris par les hautes classes indigènes, depuis le Dekkan jusqu’au Kachemyr, et depuis Calcutta jusqu’a Bombay.