Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 24.djvu/361

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
357
LITTÉRATURE ANGLAISE.

fait ; l’auteur du second n’a écrit son livre que d’après des documens inédits ou peu connus qui lui ont permis de rectifier souvent Robertson, Hume, Lingard et Walter Scott. Malheureusement, c’est l’œuvre d’un antiquaire, et les antiquaires écrivent rarement avec élégance et clarté.

Parmi les éditions nouvelles qui paraissent à Londres, nous signalerons surtout la collection populaire des œuvres de Daniel de Foë, publiée par Hazlitt, fils du célèbre William Hazlitt, le Geoffroy de la presse anglaise, ainsi que les belles collections des œuvres complètes de Thomas Moore, de Litton Bulwer et de Southey. Tous ces noms ont reçu le baptême européen, sans lequel il n’y a pas aujourd’hui de véritable illustration. Daniel de Foë, oublié depuis tant d’années et comme enseveli sous la gloire de son Robinson Crusoë, a reparu enfin, et repris la place qui lui était due ; exemple singulier de tardive justice ! Rival tout au moins de Fielding et de Richardson ; publiciste, dialecticien, historien, narrateur, écrivain satirique et polémique de premier ordre, cet homme de bon sens et de génie, chez lequel la véracité et la simplicité du bon sens amortissaient l’éclat et la manifestation extérieure des facultés plus vives de l’intelligence, a été traité par ses contemporains comme un escroc, par le versificateur Pope comme un imbécile, par la magistrature anglaise comme un criminel. Le pilori auquel les préjugés politiques de son temps le clouèrent, s’est changé en trône de gloire ; lui-même l’avait pressenti, quand il s’écriait dans son ode :

« Salut, pilori, hiéroglyphe de honte, symbole d’infamie, qui plus tard doubleras ma renommée[1] ! »

L’auteur de l’Histoire parlementaire de la Grande-Bretagne et de l’Histoire de l’Europe au moyen-âge, Henri Hallam, parvenu à un âge avancé, vient de publier, sous le titre d’Introduction à l’Histoire littéraire des XVe, XVIe et XVIIe siècles, un livre qui se recommande par une sorte d’utilité positive, dénuée de toute philosophie générale. C’est plutôt un catalogue qu’une histoire, et ce catalogue est incomplet. Épouvanté des témérités et des hypothèses qui ont emporté dans les nuages Schlegel et ses compatriotes, le jurisconsulte anglais a classé méthodiquement le dossier littéraire des trois siècles qu’il embrasse. Il a donné des dates, des titres, et quelquefois des critiques déta-

  1. Hail, thou hieroglyphic of shame !

    Hymn to the Pillory.