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LE MAROC ET LA QUESTION D’ALGER.

Les nations chrétiennes sont loin d’en tirer parti ; c’est ce que prouvera bientôt le résumé des relations entretenues récemment par elles avec le Maroc. Nous commencerons par le gouvernement napolitain. En 1834, le renouvellement de son traité avec le Maroc fut pour le sultan un prétexte de lui imposer des conditions nouvelles et onéreuses. Les pourparlers duraient depuis long-temps, et le consul se prétendait toujours hors d’état de conclure, faute de communications ministérielles. Pour mettre un terme à son hésitation, le sultan lui rendit ses passeports ; le consul se retira à Gibraltar. Quelques mois après le nouveau traité était conclu par l’intermédiaire de M. Bénoliel, et Naples se soumettait à offrir au sultan un présent convenable, auquel serait ajoutée une quantité donnée de soufre. Le soufre fut reçu d’abord à l’état brut. Une fois emmagasiné, l’on prétendit qu’il n’était d’aucun usage, et qu’il s’agissait de soufre purifié. On obéit ; un navire de guerre napolitain se présenta, couleurs déployées, sur la rade de Tanger, apportant le soufre en canon qu’on exigeait de lui. Ce dernier fut accepté ; mais on ne voulut jamais rendre le soufre brut qu’on avait refusé d’abord.

À la même époque, le sultan refusait l’exéquatur et l’admission de M. Béramendy, nouveau titulaire du consulat espagnol, jusqu’à ce que son prédécesseur, M. Briare, eût satisfait à toutes les dettes particulières qu’il avait contractées. En 1829, au moment du blocus autrichien, la garnison de Ceuta faisait l’exercice du canon. L’isolement dans lequel elle vit rend fort naturelle la ferveur de cet exercice. La cour de Maroc en prit ombrage, et signifia son mécontentement au cabinet de Madrid, qui se montra tout aussi pacifique que le cabinet de Naples, et ordonna à la garnison de chercher un autre amusement. En 1835, une collision étant survenue entre des sujets marocains et l’équipage d’un navire génois, à bord duquel ils étaient embarqués, la cour de Turin rappela son chargé d’affaires, qui n’avait point manqué à ses devoirs.

Le Danemark et la Suède ne se montrèrent pas moins dociles aux caprices des pirates barbaresques. Après avoir entamé, en 1755, des négociations dont l’intermédiaire était un juif inhabile, le cabinet danois se crut autorisé à envoyer à Sainte-Croix une flottille portant des ingénieurs, des ouvriers et des matériaux, pour élever sur ce point une forteresse protectrice de son commerce. L’ambassadeur, qui montait le vaisseau amiral, fut fait prisonnier, les matériaux furent saisis, et l’on exigea, avant tout arrangement, la rançon de l’ambassadeur. Conclu à cette occasion, le traité de 1757 concédait à