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l’exportation annuelle qui s’était élevée à quatre-vingt mille quintaux est de quarante mille quintaux environ. Parmi ces laines, les plus grossières sont celles du Rif et des provinces limitrophes de la régence et du désert. D’autres, de qualité moyenne, sont remarquables surtout par la légèreté, celles de Tamesna, de Ducala et des Beni-Hassen. Il y a enfin des qualités très fines, et qui pourraient se comparer à celles d’Espagne : ce sont les laines de Tadla et d’Orderra.

La qualité du blé que l’on récolte au Maroc est excellente dans quelques provinces, celle de Tamesna, par exemple ; le blé ne diffère de celui de la mer Noire que par le mélange d’une petite quantité de corps étrangers. On a exporté jusqu’à cinq ou six cent mille fanègues (mesure espagnole valant cinquante-cinq litres et demi) dans une seule année. La fanègue revenait à bord à moins d’une piastre forte.

La récolte d’huile, ordinairement très abondante au Maroc, y est sujette néanmoins à de grandes variations. Une amande appelée argan donne une huile d’un parfum assez agréable, quand elle est fraîche ; les naturels la préfèrent à l’huile d’olive. De 1768 à 1769, on exporta de Sainte-Croix et de Mogador 40,000 quintaux métriques d’huile d’olive ; et l’année dernière le quintal du pays, qui est de 112 kilog. et demi, s’offrait sur les lieux de production pour 36 ou 45 francs.

On pourrait exporter annuellement du Maroc, sans nuire à l’agriculture, de 6 à 8,000 bœufs et vaches du poids de 200 à 300 kil. Ce pays fournirait encore des mules et des chevaux en grande quantité. Les mules, petites ou grandes, sont fortes, ont le pied solide et portent aisément 150 à 200 kilog. Les Anglais en ont exporté beaucoup pour l’Amérique, de 1765 à 1775. Depuis cette époque, l’exportation a cessé. Une bonne mule coûte 160 francs au moins, 350 au plus. Les belles races de chevaux que le Maroc a possédées sont perdues ; étrangers à l’élève des chevaux, abandonnant au hasard le croisement des races, les propriétaires en altèrent la nature et la beauté, pour ne pas exciter la cupidité du sultan. Ils brûlent au flanc, à la cuisse, et souvent aux quatre pieds, leurs chevaux, qui d’ailleurs, soumis de trop bonne heure et avec trop peu de ménagement aux violens exercices du jeu de la poudre, sont épuisés à sept ans. C’est par le feu appliqué aux pieds qu’on cherche à corriger ou à prévenir le gonflement de leurs jambes. Presque tous les beaux chevaux de Barbarie se trouvent dans les écuries du sultan ; encore cette beauté est-elle médiocre, si l’on en juge par ceux qu’il donne à plus d’un ambassadeur en échange des cadeaux qu’il reçoit.