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HUIT MOIS AU MINISTÈRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE.

additionnel le moins de temps possible. Il ne produisait donc aucun fruit et n’excitait qu’un très médiocre intérêt de la part des maîtres et de la part des élèves, et ce peu de temps accordé aux sciences, et qui ne leur servait à rien, était un dommage considérable pour l’enseignement des lettres auquel il avait été retranché. Je ne prétends pas que ce mélange n’eût quelques avantages accessoires ; mais en tout ce n’est pas l’accessoire, c’est le principal qu’il faut considérer, et le principal ici, c’est l’immense inconvénient de tout mêler dans la tête des jeunes gens et d’énerver leurs forces en les disséminant sur un trop grand nombre d’objets disparates. Quel est le but du collége ? Ce n’est pas de donner une certaine dose d’instruction, non ; le but du collége est tout autrement général et élevé ; ce n’est pas moins, je l’ai déjà dit, que l’éducation de l’intelligence à l’aide d’enseignemens divers convenablement répartis selon les forces et les besoins de chaque âge. De là cette grande maxime qui sort et de la connaissance de l’esprit humain et de l’expérience universelle, que les lettres doivent venir avant les sciences dans l’intérêt des unes et des autres, et dans l’intérêt commun de la bonne et solide culture de l’intelligence. Quand les lettres, par l’enseignement des langues et de l’histoire, ont cultivé à la fois et l’esprit et le cœur et l’imagination, quand elles ont formé l’homme, c’est aux sciences de l’achever en donnant la main à la philosophie ; je parle des sciences prises au sérieux, car tout enseignement qui n’est pas sérieux n’est pas seulement inutile, mais dangereux ; il amollit et effémine l’esprit ; il est un mauvais apprentissage de la vie, il donne ce préjugé, qu’avec peu de peine on peut apprendre quelque chose, ce qui est radicalement faux. Voilà pourquoi j’ai supprimé, depuis la sixième jusqu’à la rhétorique, tous ces petits et légers enseignemens d’histoire naturelle, de chimie et de géométrie ; et je les ai réunis et placés après la rhétorique dans l’année de philosophie, selon la pratique universelle en France, jusqu’en 1789, et selon le plan d’études de l’empire tel qu’il était suivi de mon temps. Cependant j’ai laissé la faculté d’établir des conférences libres de mathématiques depuis la sixième jusqu’à la rhétorique pour le petit nombre de nos élèves qui n’ont pas en vue le baccalauréat ès-lettres, c’est-à-dire l’éducation complète et régulière du collége, mais les écoles spéciales, militaires et autres, et qui par conséquent ne font d’ordinaire ni rhétorique ni philosophie et ont besoin d’une culture scientifique particulière avant d’arriver à l’enseignement approfondi des sciences qui commence à la fin de la rhétorique. Suit qui veut ces conférences préparatoires ; elles ne sont