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DE L’INFLUENCE FRANÇAISE EN ITALIE.

Sardaigne servaient d’asile aux rois de Naples et de Piémont, l’Italie, qui à présent est morcelée en huit états, se trouvait alors divisée en six. La différence, comme on le voit, n’est pas grande. Cet arrangement pouvait être utile pour la France en temps de paix et de prospérité ; mais, à chaque guerre avec l’Autriche, l’Italie devenait une charge, et il fallait dépenser beaucoup d’argent et sacrifier beaucoup d’hommes pour la contenir, car les Italiens faisaient alors ce qu’ils ne cesseront de faire tant qu’on les traitera comme un peuple conquis : ils appelleront de tous leurs vœux les Français pour chasser les Autrichiens, et peu de temps après l’arrivée des Français, pour leur échapper, ils tendront les bras aux Autrichiens. Aussi, à l’approche de la chute de l’empereur, il y eut partout des émeutes et des soulèvemens en Italie, et l’on sait qu’il y en eut même qui furent l’ouvrage des libéraux.

Cependant, en quittant l’Italie, les Français laissèrent des souvenirs ineffaçables. Ils avaient fait beaucoup : le nouveau code, l’égalité devant la loi, la division des propriétés, l’abolition des mains-mortes et des substitutions, la suppression des ordres monastiques, étaient des améliorations dues aux Français, et qu’à la restauration les anciens gouvernemens ne purent pas entièrement abolir, ils avaient fait mieux : ils avaient armé et aguerri le peuple, ils avaient donné un exemple admirable de la puissance de la discipline à des hommes plus capables en général de montrer de la bravoure individuelle que de soutenir avec calme, réunis en bataillons, le choc de l’ennemi. Aussi, après leur départ, malgré les proclamations les plus énergiques, dans lesquelles on avait cherché, à l’aide des promesses de liberté et d’ancienne gloire militaire, à soulever les Italiens, on se garda bien de conserver en Italie une armée italienne, et l’on eut toujours soin d’éparpiller dans les cantonnemens les plus reculés de l’empire les soldats qu’on tirait du royaume lombardo-vénitien.

Les idées à l’aide desquelles en Allemagne comme en Italie on avait excité les peuples contre Napoléon ne pouvaient pas rester stériles ; et, lorsque la révolution d’Espagne fit croire aux Italiens que le temps était venu de secouer leurs chaînes, la révolution de Naples éclata, puis celle du Piémont, et une grande fermentation se manifesta dans la Lombardie et dans la Romagne. Si la France, à laquelle tout le monde tendait les bras depuis qu’on avait éprouvé de nouveau le joug de l’Autriche, se fût réunie à l’Angleterre et eût protesté contre les intentions de la sainte alliance, elle aurait raffermi son ascendant en Italie, et probablement l’invasion de Naples