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DE L’INFLUENCE FRANÇAISE EN ITALIE.

part qu’ils avaient prise à ce grand évènement que comme les représentans de la politique du pays, encouragèrent-ils les tentatives et les espérances des Italiens ? C’est ce qu’il est bien difficile de déterminer. Il est probable que les uns en dirent plus qu’ils n’auraient dû dire, et que les autres comprirent plus qu’ils n’auraient dû comprendre. Toujours est-il qu’en entendant proclamer le principe de non-intervention, les Italiens crurent le moment opportun. On n’ignore pas comment se termina cette levée de boucliers. Les Autrichiens passèrent le Pô avec des troupes considérables, et sans même déclarer la guerre. Un changement de ministère s’ensuivit en France, et les Italiens, écrasés avant d’avoir songé à se défendre, furent encore plus sensibles aux sarcasmes dont on les accabla qu’à l’abandon qui avait amené leur chute.

Ce changement si subit porta un coup fatal à l’influence française en Italie. Non-seulement la défiance et le découragement firent place aux sentimens qui portaient généralement les Italiens vers la France, mais l’immense émigration qui fut la suite du triomphe des Autrichiens, éloigna du sol italien des milliers d’hommes imbus des idées françaises, et qui avaient de l’ascendant dans le pays. Or, en Italie, où il n’y a ni tribune, ni liberté de la presse, ni armée nationale les réputations se créent lentement et sont très difficiles à remplacer.

L’influence qui échappait à la France aurait pu passer aux mains de l’Autriche si celle-ci avait su s’arrêter à temps et prendre l’initiative du progrès. Heureusement pour l’Italie, les Autrichiens n’ont jamais deviné ce qu’il fallait faire pour s’emparer de l’esprit des Italiens ; on ne comprit même pas le cri de Viva i Tedeschi ! qui s’éleva dans quelques parties des légations à l’arrivée des troupes autrichiennes, et qui signifiait seulement qu’on les préférait encore au gouvernement pontifical. N’ayant plus d’espoir dans la France, les Italiens recommencèrent à faire ce qu’ils avaient déjà fait sous la restauration : ils se rattachèrent au parti qui leur promettait un appui, et cet appui, ils l’attendirent des radicaux français, qui se déclaraient les amis et les protecteurs des peuples opprimés, et qui repoussaient les actes de leur gouvernement. Pendant les dernières années qui suivirent l’invasion de la Romagne, tout ce qu’il y avait de patriotes ardens en Italie se rallia au parti radical. Ce mouvement dirigé par des chefs qui n’étaient pas en Italie, finit par inquiéter sérieusement les gouvernemens italiens, et l’on poursuivit ces apôtres de la liberté avec une sévérité qui prit dans certains états le caractère