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vagues, des colères indéterminées, des courages indécis, un respect traditionnel de l’autorité royale et un extrême mépris pour le roi lui-même. « Jugez, dit l’ambassadeur français Harlay de Beaumont, quels sont l’état et la condition d’un prince que les prédicateurs attaquent en chaire, que les comédiens parodient sur le théâtre, dont la femme se rend à ces représentations tout exprès pour avoir le plaisir de se moquer de son mari, que son parlement brave et dédaigne ; et qui est universellement haï de tout son peuple ?… Un langage audacieux, des caricatures injurieuses, des pamphlets calomnieux, tout ce qui annonce la guerre civile est commun ici ; symptômes doublement puissans et qui indiquent assurément l’amertume profonde des esprits dans un pays tel que l’Angleterre, où la justice est plus respectée et le devoir plus sacré que partout ailleurs. » C’était en 1620 que l’ambassadeur de France écrivait ces révélations. En 1621, l’année suivante, Pym leva l’étendard des communes contre la race des Stuarts ; on sait à quoi cette tentative aboutit. Jacques lui-même parut deviner l’échafaud de Charles Ier. Quand il vit Pym et ses onze confrères lui apporter la réponse altière du parlement à sa lettre ridiculement despotique, il s’écria : Place ! et des fauteuils ! voici les douze rois ! Il avait raison. Je ne crois pas que le caractère de Jacques ait été suffisamment apprécié. C’était un homme vicieux, ridicule et pédantesque ; mais il ne manquait pas d’esprit, et comme il y joignait de la bassesse, il échappait aux embarras beaucoup mieux que Charles Ier. Quand il ne pouvait plus faire peur, il faisait pitié. Ce n’est ni le talent ni la noblesse des actes qui réussissent dans les affaires de ce monde, c’est l’à-propos ; peu importe qu’il se joigne à l’avilissement et au ridicule : les hommes n’y regardent pas de si près.

Le premier soin de Pym, qui avait passé six années dans sa retraite domestique et ne connaissait point l’état des partis, fut de s’affilier au groupe le plus honorable et le plus distingué de l’opposition, à celui qui réunissait tous les talens de la chambre. Les philosophes commencent les révolutions, les audacieux les font éclore, et les ambitieux les achèvent. C’est un fait curieux que jamais les réformes ne viennent d’en bas ; c’est de l’intelligence, c’est de la sphère isolée du penseur et du savant qu’elles descendent. Plus elles s’éloignent de cette école première, plus elles deviennent brutales et violentes ; alors elles oublient étourdiment leurs premiers moteurs. En 1620, comme en 1780, des coteries de philosophes et de savans préparaient en secret la pâte formidable des révolutions futures. Un antiquaire célèbre, sir Robert Cotton, réunissait