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LES SETTE COMMUNI.

du pays ne nous le font pas savoir. Il est probable qu’elle échappa à quelqu’un de ces effroyables tremblemens de terre qui, à diverses reprises, ont bouleversé toute la contrée environnante. De longues lézardes sillonnant ses murailles semblent assez l’indiquer. À l’intérieur, l’église est richement décorée, mais la plupart des tableaux qui couvrent ses murailles, et rappellent l’école vénitienne, sont exécrables. Une quantité prodigieuse d’ex voto est appendue aux parois de ses chapelles latérales où l’on voit des tombeaux d’anciennes familles couverts de grandes dalles en marbres du pays. La toiture de cette église est cintrée comme celle de l’église de Saint-Virgile à Trente, et son clocher est bâti dans le même goût. On raconte au sujet de la croix de fer qui surmonte le clocheton de la tour une anecdote touchante. Un jeune couvreur avait été chargé de placer cette croix ; c’était le coup d’essai de l’ouvrier, ce fut un coup de maître. Le clocher placé sur une hauteur domine tout le pays d’alentour. Quand l’ouvrier eut scellé la croix dans la boule d’étain, tout fier d’avoir si heureusement terminé sa tâche, au lieu de redescendre comme il aurait dû le faire, il se retourna vers le peuple et voulut le haranguer. À peine avait-il balbutié quelques paroles qu’il sentit sa tête se troubler, et s’interrompant tout à coup : — Père, s’écria-t-il en se tournant vers un vieillard placé sous le toit de l’église, au-dessous de lui, au secours ! au secours ! Je vois les montagnes et les forêts des environs qui bondissent et viennent à moi. — Mais le vieillard était trop éloigné pour secourir son enfant ; le bras d’un géant n’eût pu atteindre jusqu’à lui. Le malheureux père s’agenouilla donc sur l’arête du toit, et s’adressant aux assistans : — Priez comme moi pour l’urne de mon malheureux fils, car le pauvre enfant est perdu. — À peine achevait-il sa prière, qu’il prononçait à haute voix et que tout le peuple répétait en chœur, que le malheureux jeune homme glissa le long du toit, tomba du haut en bas de la tour et se tua.

Le territoire des Sette Communi est un de ces pays de transition, jetés à la limite de l’Allemagne et de l’Italie. Le climat participe de ces deux régions ; l’hiver y est rude, de longue durée, et ne cesse que pour faire place à des chaleurs insupportables qui se prolongent tout l’été. Ce petit état comprend toute la contrée renfermée d’une part entre la Brenta et les collines volcaniques de Marostica et de Saint-Michel ; de l’autre, entre les montagnes de Trente et de Roveredo, et le val d’Astico, du côté de Vicence ; il est donc limité au nord et à l’ouest par le Tyrol italien, au sud et à l’est par les provinces lombardo-vénitiennes.