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REVUE. — CHRONIQUE.

n’a pas été présentée. Pourquoi ? Peu importe. La dignité et l’indépendance de la Suisse ont été ménagées ; c’est l’essentiel. C’est à la Suisse maintenant de nous montrer, par des mesures pleines à la fois de fermeté et de modération, qu’elle est en effet digne des égards et de la déférence que les puissances voisines ont eu à cœur de lui témoigner.

M. le général Bugeaud a pris possession du gouvernement de l’Algérie. Il en a commencé l’inspection ; il visite, il observe, il encourage, il dirige ; tout annonce un gouverneur actif, éclairé, plein de ressources ; administrateur habile, homme de guerre redoutable aux Arabes, il paraît vouloir consolider notre conquête par les armes et par l’établissement colonial. M. Bugeaud entrera ainsi dans la bonne voie ; le canon et la charrue nous sont également nécessaires en Afrique. Nous l’avions dit, nous le répétons aujourd’hui avec M. le gouverneur-général : des agriculteurs, vigoureusement protégés par une vaillante armée, peuvent seuls fonder en Afrique une puissance qui dédommage un jour le pays de ses avances et de ses sacrifices. M. Bugeaud est un agriculteur habile, pratique, un soldat actif et prudent ; il peut mieux que personne résoudre ce double problème, vaincre et fonder, repousser les Arabes et appeler des colons qui remuent enfin ce sol africain et en fassent sortir de riches moissons et une végétation qui neutralise les principes délétères du climat. Nous n’étions pas admirateurs passionnés de M. Bugeaud, homme politique et orateur parlementaire ; nous sommes, au contraire, pleins de confiance dans l’avenir de la vaste colonie qu’il gouverne. M. Bugeaud est aujourd’hui tout entier à la chose à laquelle il est éminemment propre. Il rendra d’importans services au pays. Un des fils du roi, M. le duc d’Aumale, est allé rejoindre l’armée d’Afrique. C’est dire qu’une nouvelle campagne va s’ouvrir, qu’il y a en Afrique des périls à affronter, des ennemis de la France à combattre. Le pays applaudit à cette noble ardeur, et il est fier de voir que c’est avant tout sur le champ de bataille, en face de l’ennemi, que nos princes veulent être les premiers.

M. Villemain vient de présenter à la chambre des députés un travail important et qui préoccupe fortement les esprits. Nous voulons parler du projet de loi sur l’instruction secondaire, de ce projet qui doit réaliser une liberté promise par la charte et résoudre une question grave, délicate, dont les difficultés et les périls tiennent la solution en suspens depuis plusieurs années.

Cette grande question a occupé tous les hommes éminens de l’Université qui ont successivement dirigé le département de l’instruction publique. M. Guizot, après avoir doté le pays d’un vaste et beau système d’instruction primaire, avait présenté à la chambre un projet de loi pour régler la liberté de l’enseignement dans l’instruction secondaire.

M. Villemain, pendant le ministère du 12 mai, avait repris la matière en sous-œuvre, en profitant à la fois des idées de son prédécesseur et des travaux non moins importans de la commission de la chambre des députés. Le projet de M. Villemain ne put être présenté à la chambre : le cabinet du 12 mai céda