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ment anglais. Il ne cherchait pour lui-même dans ces négociation qu’un avantage, celui de gagner du temps et d’étendre son influence parmi ses compatriotes, plus disposés à ressaisir les habitudes d’une vie aventureuse qu’à se rallier autour d’une légitimité qui leur était imposée par la civilisation ambitieuse d’un peuple européen. Dost-Mohammed-Khan, chef brave, habile et long-temps heureux, regretté par d’anciens compagnons d’armes qui n’attendaient qu’une occasion favorable pour se ranger de nouveau sous son étendard ; plusieurs avaient déjà déserté la cause de Shâh-Shoudjâ, et quand il fut avéré que le vieux serdar Barekzaï approchait de Bamiân par la passe Ak-Robât, que les avant-postes des troupes anglo-afghanes venaient d’abandonner pour se replier sur le quartier-général, une compagnie tout entière d’un régiment afghan, commandée par un officier anglais, décampa pendant la nuit et passa à l’ennemi. Cependant les mouvemens de Dost-Mohammed ne pouvaient échapper à la vigilante surveillance de sir William Macnaghten, et quand il ne fut plus permis de douter qu’il approchait des passes, des troupes furent envoyées de Kaboul pour renforcer la brigade de Bamiân, sous le commandement du brigadier Dennie. Cet officier-général, ayant poussé une forte reconnaissance dans la direction où il s’attendait à rencontrer seulement l’avant-garde du corps ennemi, se trouva inopinément, le 18 septembre dernier, en présence de la petite armée que l’ex-amîr de Kaboul dirigeait en personne contre Bamiân. Sans hésiter un instant, et malgré l’infériorité numérique de ses troupes (puisqu’il n’avait que cinq cents hommes d’infanterie régulière, moitié hindoustanis, moitié ghaurkas, trois à quatre cents hommes de cavalerie et deux pièces de canon à opposer à cinq ou six mille Ouzbeks et déserteurs afghans), le brigadier marche droit à l’ennemi, le déloge en un instant de ses positions, le met dans une déroute complète, et lance à sa poursuite sa cavalerie, qui en fait un grand carnage. Dost-Mohammed-Khan, blessé dans l’action, s’échappe à grand’peine avec un de ses fils et quelques centaines de cavaliers ; les tentes et tous les équipages de l’armée tombent au pouvoir des vainqueurs. Le résultat de cette brillante affaire du 18 septembre fut de déterminer le chef ouzbek de Khouloum à traiter immédiatement avec les Anglais. Dost-Mohammed, abandonné de ses alliés et voyant ainsi les débris de sa petite armée réduits à deux ou trois cents cavaliers, voulut encore, par une tentative désespérée, se placer subitement au milieu de ses partisans du Kohéstan proprement dit. Il pénètre dans cette province à la fin d’octobre, parvient à rassembler un corps de