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traité sur la déclamation. Ces trois ouvrages ont été couronnés par des sociétés littéraires.

Dans cette même ville de Rotterdam, où M. Bogaers écrit ses vers si châtiés et si corrects, habite Tollens, le poète le plus populaire de la Hollande. Tollens est né à Rotterdam en 1778. Il a publié des odes et des chansons, les unes tendres et gracieuses, les autres empreintes d’un profond sentiment de patriotisme, presque toutes remarquables par la simplicité de la forme, et presque toutes chéries du peuple. C’est lui qui a composé le chant national hollandais qui est pour son pays ce qu’est le God save the king pour l’Angleterre, et que j’ai souvent entendu entonner en chœur dans les rues par les ouvriers, dans les écoles par des centaines d’enfans. Qu’on me permette d’en citer au moins quelques strophes non-seulement comme œuvre poétique, mais comme expression d’une pensée populaire.

« Que celui dont les veines renferment un vrai sang hollandais pur de toute contagion étrangère, que celui dont le cœur palpite pour la patrie et pour le roi unisse sa voix à la nôtre. Qu’il vienne à nous avec une ame libre et chante le chant de fête qui plaît au ciel, le chant du prince et de la patrie !

« Frères, entonnez tous avec la même pensée ces accords entendus du maître suprême. Il a aux yeux de Dieu une vertu de moins, celui qui oublie le prince et la patrie. Il n’a dans sa froide poitrine nul amour pour ses frères, celui qui ne s’émeut pas à notre chant, à notre prière pour le prince et pour la patrie.

« Dieu, protége, garde le sol où nous vivons, le coin de terre où s’éleva notre berceau, où l’on creusera notre tombe. Nous t’adressons notre prière avec une ame émue, ô Dieu, conserve notre prince et notre patrie !

« Protége le roi sur son trône. Que sa puissance ait constamment pour base la justice. Qu’il se montre toujours à nos yeux moins brillant par l’or de sa couronne que par ses vertus ! Soutiens et dirige le sceptre entre ses mains. Anime et défends le prince et la patrie.

« Dans un même vœu nos cœurs se confondent. Dans la joie et dans la douleur, nous n’avons qu’une même pensée : le prince et la patrie. Écoute, ce n’est pas un cri qui souffre un désaccord, c’est une parole d’amour, c’est un même chant pour le prince et pour la patrie. »

Parmi les poètes dont la Hollande aime à prononcer le nom, je dois citer M. Da Costa, disciple de Bilderdyk, écrivain austère et religieux dont l’ame s’attendrit sur les douleurs de la vie humaine, puis s’élance avec enthousiasme vers les régions éternelles ; Beets, qui joint dans ses vers la mélancolie de la pensée allemande à la pureté du style classique ; Withuys, à qui l’on doit plusieurs chants