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GALILÉE.

premiers raisonnent à merveille et semblent toujours sur le point d’accabler leur faible adversaire. Cependant, malgré leur supériorité incontestable, ils finissent par céder. Ce résultat, qui étonne le lecteur, lui fait deviner un pouvoir occulte et irrésistible qui commande même à la logique et au raisonnement. Il y a dans tout cela beaucoup d’art et de finesse ; aussi ne faut-il pas s’étonner si les censeurs y furent pris. Ce qui paraît surtout les avoir décidés à donner leur approbation, c’est l’avertissement au lecteur qui commence de la manière suivante :

« On a promulgué à Rome, il y a quelques années, un édit salutaire où, pour obvier aux scandales dangereux de notre siècle, on imposait silence à l’opinion pythagoricienne du mouvement de la terre. Il y eut des gens qui avancèrent avec témérité que ce décret n’avait pas été le résultat d’un examen judicieux, mais d’une passion mal informée ; et l’on a entendu dire que des conseillers tout-à-fait inexperts dans les observations astronomiques ne devaient pas, par une prohibition précipitée, couper les ailes aux esprit spéculatifs. Mon zèle n’a pas pu se taire en entendant de telles plaintes. J’ai résolu, comme pleinement instruit de cette prudente détermination, de paraître publiquement sur le théâtre du monde pour rendre témoignage à la vérité. J’étais alors à Rome, où je fus entendu et même applaudi par les plus éminens prélats : ce décret ne parut pas sans que j’en fusse informé. Mon dessein, dans cet ouvrage, est de montrer aux nations étrangères, que sur cette matière on en sait, en Italie, et particulièrement à Rome, autant qu’il a été possible d’en imaginer ailleurs. En réunissant mes spéculations sur le système de Copernic, je veux faire savoir qu’elles étaient toutes connues avant la condamnation, et que l’on doit à cette contrée, non-seulement des dogmes pour le salut de l’ame, mais encore des découvertes ingénieuses pour les délices de l’esprit. »

Ce Dialogue ne contient pas seulement un examen des deux systèmes astronomiques de Copernic et de Ptolémée : on y pose les bases de la dynamique, on y traite par incidence d’une multitude de phénomènes que Galilée avait observés pour la première fois, ou dont il tirait de nouvelles conséquences. C’est une critique victorieuse de tous les anciens systèmes de philosophie naturelle. Aussi ne faut-il pas s’étonner de l’effet immense que produisit un tel ouvrage, et de la colère des péripatéticiens. Les hommes les plus illustres de cette époque s’empressèrent de féliciter Galilée au sujet de ce Dialogue qui suscita tant de discussions, et contre lequel les partisans des