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lequel on enveloppait ce qu’on leur vendait était une lettre autographe de Galilée. Il ne dit rien, et, s’esquivant sous un prétexte pendant le dîner, il courut chez le charcutier, acheta tout ce qui restait de ces manuscrits dans la boutique, et ne tarda pas à se procurer ce qu’il y avait encore dans le silo. Plus tard il ajouta à cette collection les manuscrits de Viviani et d’autres savans, qui avaient été dispersés avec une impardonnable incurie. Nelli puisa dans ces documens, et surtout dans la correspondance de Galilée, qu’il avait retrouvée presque en entier, les élémens d’une grande biographie de Galilée en deux volumes in-quarto, qui fut imprimée en 1793, et qui devait être suivie d’un volume de correspondance et de preuves. Malheureusement il mourut avant d’avoir pu compléter son travail, et des revers de fortune ayant frappé ses héritiers, les manuscrits de Galilée furent saisis, ainsi que l’ouvrage encore en feuilles, et ce ne fut que plus de vingt après que, le séquestre ayant été levé, l’ouvrage de Nelli fut livré au public. Les manuscrits passèrent alors dans une bibliothèque où ils sont encore cachés, sans qu’on pense à les publier. On doit s’étonner qu’on n’ait pas songé à donner une édition complète des écrits qui restent encore du plus grand philosophe de l’Italie, dans laquelle devraient naturellement être compris les travaux inédits de ses plus illustres disciples, qui furent les dépositaires de ses pensées. Une telle publication honorerait le pays qui l’entreprendrait, et serait le plus beau monument qu’on pût y élever aux sciences. Ces reliques ne sont pas aussi minimes qu’on pourrait le croire : la collection manuscrite dont nous parlons se compose d’un grand nombre de volumes, parmi lesquels les ouvrages inédits abondent ; et l’on sait que des hommes tels que Galilée, Torricelli et Viviani, consignaient dans tous leurs écrits, dans leurs lettres et jusque dans les moindres fragmens, des idées nouvelles et dignes d’être répandues. Il faut qu’on n’oublie pas, en Toscane, qu’une grande réparation est due à Galilée, et que la meilleure manière de protester contre ses persécuteurs, de se montrer plus avancé que les Médicis, et de rendre un digne hommage à la gloire du penseur qu’ils n’osèrent préserver d’une injuste persécution, c’est de conserver et de transmettre à la postérité tous les débris, les moindres reliques de ce martyr de la science.

Au reste, le hasard, qui se plaît à cacher et à faire découvrir tour à tour les manuscrits de Galilée, nous a procuré récemment le plaisir de retrouver cette correspondance de Galilée que Nelli avait citée et que l’on croyait perdue pour le public. Elle était enfouie dans une