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DE LA CRISE ACTUELLE EN ANGLETERRE.

dispendieuses, une des plus embarrassantes que les Anglais aient encore soutenues dans cette partie du monde.

En Orient enfin, les hauts faits de l’artillerie anglaise à Saint-Jean-d’Acre, loin de tout éclaircir, ont tout embrouillé, et la situation de l’empire ottoman était certes moins compliquée et moins chancelante le jour où, au mépris de l’alliance française, lord Palmerston a si glorieusement entrepris de l’affermir et de la simplifier. Il ne s’agit plus aujourd’hui d’un différend à vider entre un souverain et un vassal puissant ; il s’agit de l’insurrection et de l’anarchie, qui, s’étendant graduellement sur toutes les parties de l’empire, le menacent d’un démembrement prochain et d’une prompte décomposition ; il s’agit des difficultés si nouvelles et si graves que cette crise et ses suites peuvent faire naître en Europe, au sein même de la coalition.

Ainsi, à l’extérieur, partout des embarras et des nuages amoncelés. Je ne crois pourtant pas que ces embarras et ces nuages soient fort menaçans pour les tories. Ce sont, après tout, les whigs qui ont mis dans cet état l’affaire d’Amérique, celle de l’Asie centrale, celle de la Chine, celle d’Orient. De quel droit, devenus opposition, viendraient-ils s’en faire une arme contre leurs successeurs ? Ne voit-on pas que si, comme Anglais, sir Robert Peel peut et doit souhaiter l’heureuse et prompte conclusion de toutes ces affaires, comme homme de parti il a un intérêt diamétralement opposé ? Que l’Orient, par exemple, s’enflamme de nouveau, et que l’Angleterre, inquiétée par la Russie, invoque l’appui de la France sans pouvoir l’obtenir, quel thème pour sir Robert Peel ! quelle confusion pour lord Palmerston ! « Vous parlez de l’alliance française, pourra dire le premier ministre à ses prédécesseurs ; mais cette alliance, qui l’a compromise, qui l’a perdue ? C’est sous le duc de Wellignton, tory, que les bases de l’alliance française avaient été posées ; c’est sous lord Melbourne, whig, qu’elles ont été détruites. Ne nous reprochez donc pas les conséquences de votre imprévoyance et de votre incapacité. »

Comme je l’ai dit, l’Angleterre, d’ailleurs, ne s’occupe guère de politique étrangère que lorsque ses intérêts commerciaux sont compromis, ou son honneur national menacé. Mais, dans l’un et l’autre cas, elle se lève tout entière, sans distinction d’opinion ou de parti. En ce qui touche les affaires extérieures, sir Robert Peel, de même que ses prédécesseurs, trouvera donc dans le pays indifférence ou assistance, et ce n’est pas de ce côté qu’il risque d’être ébranlé.

La situation financière est plus embarrassante, et il est difficile de