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« Accepter, consigner dans une convention formelle, disait le cabinet du 12 mai, la promesse de ne pas renouveler le traité d’Unkiar-Skelessi, contre lequel la France et l’Angleterre ont protesté si expressément il y a six ans, ce serait, en quelque sorte, annuler cette protestation et reconnaître la validité de l’acte contre lequel elle était dirigée. Proclamer dans cette même convention le principe de la clôture des détroits si solennellement consacré par le temps, par le consentement unanime des nations, et même par des engagemens écrits, ce ne serait pas lui donner une force nouvelle, ce serait bien plutôt l’affaiblir en le classant au nombre de ces stipulations accidentelles que les circonstances amènent et qu’elles peuvent emporter. Ce qu’il faut à ce principe incessamment menacé par l’ambition d’une grande puissance, ce sont des garanties qui en assurent l’inviolabilité, ou qui du moins assurent que, lorsqu’il sera absolument nécessaire d’y déroger, cette dérogation ne pourra compromettre les grands intérêts qu’il était destiné à protéger. Nous n’avons cessé de le répéter, de telles garanties ne peuvent résulter que de l’admission simultanée des forces de toutes les cours alliées dans les eaux de Constantinople. »

Il est impossible, ce me semble, de condamner en termes plus formels et plus clairs la convention du 13 juillet dernier.

Cette convention, d’ailleurs, que dit-elle et que prévoit-elle ? Les cinq grandes puissances commencent par déclarer, chose peu contestable, que leur accord offre à l’Europe le gage le plus sûr pour la conservation de la paix générale, et que, pour bien constater cet accord, elles sont disposées à proclamer en commun, par un acte formel, leur respect pour l’ancienne règle de l’empire ottoman. Après nomination des plénipotentiaires et échange régulier des pouvoirs, le sultan dit donc « qu’il est résolu à maintenir pour l’avenir le principe suivi de tout temps comme règle immuable de son empire, en vertu duquel il est défendu aux vaisseaux de guerre de toutes les puissances étrangères d’entrer dans les détroits du Bosphore et des Dardanelles aussi long-temps que la Porte ottomane jouira de la paix » De leur côté, les cinq puissances s’engagent « à respecter cette résolution du sultan à agir conformément au principe exprimé ci-dessus »

Que l’on veuille bien parcourir toutes les hypothèses menaçantes pour l’équilibre européen, et que l’on dise s’il en existe une qui soit sérieusement prévue et détournée par ce traité. D’après les termes même du protocole, les détroits doivent rester fermés aussi long-