Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 28.djvu/183

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
179
LE CONSEIL D’ÉTAT.

II.

J’ai regret à le dire, depuis 1830, le gouvernement a laissé déchoir le conseil d’état ; il ne s’est pas toujours montré assez soucieux de la considération de ce grand corps ; il ne lui a pas demandé tous les secours qu’il était sûr d’en obtenir.

L’empire l’avait élevé trop haut ; il lui donnait le pas sur le corps législatif : excès d’honneur dont il porte peut-être aujourd’hui la peine. La restauration le fit descendre au rang qui lui revenait constitutionnellement : elle le plaça après les chambres, mais avant les cours et tribunaux. Le conseil d’état n’a point d’action sur l’autorité judiciaire, souveraine, indépendante et exclusive ; mais le droit, par les conflits, de la dessaisir en certains cas, la participation légale aux règlemens d’administration publique qui font loi pour les tribunaux, des liens intimes et étroits avec le pouvoir exécutif dont il seconde l’action multiple, tout lui donne la première place après les pouvoirs parlementaires.

Le rang occupé par le conseil d’état dans l’échelle des autorités publiques était marqué par les deux signes qui déterminent la différence des situations : la préséance et le traitement.

Après 1830, on avait adopté d’abord pour les réceptions officielles du roi l’ordre précédemment adopté. Le conseil d’état suivait les chambres et précédait la cour de cassation. Une réclamation isolée et non officielle, mais bruyante de sa nature, survint, dit-on. On craignit l’éclat, et, dans ce temps où les expédiens suppléent à la fermeté, on en imagina un qui ne manque pas de singularité. Au jour de l’an, à la fête du roi, le conseil d’état n’est plus reçu avec les grands corps de l’état ; il est admis la veille, au soir, comme en famille, après les dames du corps diplomatique, avant les employés de la liste civile. Seulement on revient à l’ancien ordre dans les publications du Moniteur. La harangue du conseil d’état est insérée immédiatement après celle de la chambre des députés.

Jusqu’en 1830, les traitemens des conseillers d’état s’élevaient au-dessus de ceux de la cour de cassation. La différence, presque nulle depuis 1816, n’avait pour objet évident que de fixer l’importance respective des deux corps. En 1830, cette différence fut effacée ; en 1831, une réduction prononcée par la chambre des députés maintint l’égalité de rémunération. Depuis, le gouvernement a demandé et