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GUERRE ET NÉGOCIATIONS DE HOLLANDE.

étaient alors en partie occupées, refusèrent d’émettre un avis. De leur côté, les députés de Frise s’abstinrent d’opiner faute d’autorisation. Ceux de Groningue étaient absens, et il n’y eut pour les pleins pouvoirs que ceux de Gueldre dont le territoire avait été déjà conquis. Dans cet embarras, la Hollande, qui était la principale, la plus puissante, la plus étendue, la plus riche des provinces, et en quelque sorte l’ame de la république dont elle dirigeait les conseils et supportait presque toutes les charges, n’hésita point à passer outre. Elle décida au nom des États-Généraux l’expédition des pleins pouvoirs[1]. Le greffier Gaspard Fagel s’était élevé contre cette résolution qui blessait ses sentimens et qui n’avait pas été prise selon les formes. Il refusa donc de signer les pleins-pouvoirs, et, lorsque M. de Groot vint les demander, il lui dit en les lui remettant : — « Vous pouvez bien aller vendre votre patrie, mais vous aurez de la peine à mettre l’acquéreur en possession. — Il vaut mieux, répondit M. de Groot, en sauver une partie que la perdre toute. — C’est en vain, lui répliqua M. Fagel, que vous songez à sauver vos terres ; on les labourera pour y semer du sel, afin que votre postérité ne puisse en jouir qu’à la quatrième génération[2] » M. de Groot partit avec les pleins-pouvoirs signés par un greffier provisoire et conçus de la manière la plus illimitée. En voici le texte


« La Haye, 26 juin 1672.

« Les États-Généraux des Provinces-Unies des Pays-Bas à tous, etc., savoir faisons, qu’ayant jugé à propos pour le bien de cet état de députer vers le roi très chrétien, et ayant une parfaite connaissance de la suffisance, capacité, fidélité, zèle et affection des sieurs de Guent, de Groot, d’Odyck et Eeck, nous leur avons donné et donnons par ces présentes, signées du président de cette assemblée et contresignées par notre greffier, à tous ensemble, ou à quelques-uns, ou à quelqu’un d’eux en l’absence par maladie ou autre empêchement des autres, plein pouvoir pour, de notre part et en notre nom, négocier,

  1. Toute cette importante délibération est détaillée de la page 129 à la page 139 du liv. XX de l’Histoire inédite de M. de Wicquefort, manuscrit no XXVI, au dépôt des affaires étrangères. — Voir aussi Basnage, Annales, etc., t. II, p. 211-215. — Cerisier, Tableau de l’histoire générale des Provinces-Unies, t. VII, p. 268-281, qui cite Wagenaar (dont l’histoire est en néerlandais), t. XIX, p. 51 et suiv. — Leclerc, Histoire des Provinces-Unies, t. III, p. 280-281.
  2. Page 139 du volume manuscrit XXVI, au dépôt des affaires étrangères.