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HISTOIRE DIPLOMATIQUE DE LA QUESTION D’ORIENT.

recourir en grace auprès de son souverain, se soumettant aux décisions de sa hautesse.

« Prenant en considération que cette opinion du cabinet de Vienne sert à constater de nouveau le respect que les cours signataires de la convention du 15 juillet portent à l’inviolabilité des droits de souveraineté et d’indépendance du sultan, — considérant en outre la nécessité d’amener promptement la crise actuelle du Levant à une solution pacifique conforme aux vrais intérêts de la Porte, les plénipotentiaires, etc., ont résolu d’adopter la marche indiquée ci-dessus. »

Ainsi les coalisés, sans respect pour leur propre parole et sans égard pour M. Guizot, retirèrent une parole donnée. Le memorandum en donne le motif. On voulait terminer promptement les opérations commencées sur la côte de Syrie, et l’on espérait avoir raison, par une démarche comminatoire, de la résistance de Méhémet-Ali qui pouvait se prolonger à la faveur de l’hiver. L’amiral Stopford fut chargé de faire connaître la résolution des puissances à Méhémet-Ali, en lui donnant un délai de trois jours pour répondre. S’il refusait de se soumettre, on ne s’expliquait pas sur ce qui pourrait arriver, et lord Palmerston se contentait de dire : « Les alliés se trouveront dans une situation très embarrassante. » Faut-il rappeler comment lord Palmerston se tire de ces embarras ?

J’ai rapporté ailleurs la conversation de lord Palmerston avec M. Guizot, le 27 octobre, au moment où l’ambassadeur français allait prendre, dans un nouveau ministère, la place de M. Thiers. Cette première ouverture du futur ministre des affaires étrangères, faite dans l’espoir d’obtenir plus que le traité de juillet, fut dédaigneusement repoussée. M. Guizot ne se laissa pas rebuter par un premier refus, et, le 4 novembre, il enjoignit à M. de Bourqueney de sonder lord Palmerston sur la possibilité d’un arrangement. Mais, avant d’aller plus loin, il convient d’indiquer quelle a été, dans la question d’Orient, la conduite générale des puissances à l’égard du ministère trop pacifique qui venait de se former à Paris.

Les dispositions des quatre cours à la paix représentent une espèce d’échelle descendante. La Prusse est au sommet, toutefois son penchant pour la France ne va pas au-delà du conseil donné par M. de Bulow à M. de Bourqueney, de demander la suspension des hostilités[1]. L’Autriche vient ensuite, qui s’efforce de persuader à M. Guizot que la meilleure conduite à tenir est pour la France de

  1. Dépêche de lord Granville à lord Palmerston, 6 novembre.