Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 29.djvu/598

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
588
REVUE DES DEUX MONDES.

à la liberté des mœurs nouvelles. Les premiers parmi eux ont pris une grande part à leurs trois révolutions.

Le nombre des diocèses était, il y a cent ans, de cent trente-un. Il est aujourd’hui de quatre-vingt-six, dont vingt archevêchés et soixante-six évêchés. Le nombre des prêtres a diminué dans une proportion plus forte ; de cinquante-six mille qu’ils étaient en 1741, ils n’étaient déjà plus que quarante-sept mille en 1806, et ils ne sont pas plus de vingt-six mille aujourd’hui. Il n’est pas à désirer que ce nombre diminue encore, car il n’est pas au-dessus de ce qui est strictement nécessaire pour le service divin. C’est surtout sur les couvens que le coup a porté. Deux cent treize couvens on été supprimés à la fois par l’administration française. Le roi, à son retour, n’en a rétabli que trente-six. Des trente-un mille moines et des vingt-trois mille religieuses qui peuplaient autrefois ces couvens, il ne reste que onze mille moines et neuf mille religieuses ; la réduction a donc été de près des deux tiers. Une amélioration sensible s’est manifestée en même temps dans la discipline du clergé, tant séculier que régulier ; en perdant ses énormes revenus, il a grandi en vertu et en piété. Quant à l’esprit, l’église napolitaine a été de tout temps très indépendante du saint-siége, et, sous ce rapport, elle a peut-être plus perdu que gagné dans la révolution. Mais aussi l’énergie de l’ancienne tradition n’est plus aussi nécessaire depuis que l’autorité royale a pris sur le clergé, comme sur le reste, un ascendant absolu. C’est au roi maintenant à se défendre contre Rome, puisqu’il a tous les pouvoirs dans les mains ; l’église napolitaine ne peut être pour lui ni un appui ni un embarras.

C’est surtout en ce qui concerne ces deux classes qu’on peut craindre que l’affaiblissement n’aille trop loin. Je conviens moi-même que la réaction est là près de l’excès. Il n’est pas sans inconvénient que le clergé napolitain ait si peu d’initiative ; je n’aime pas non plus que la noblesse soit tellement en dehors de la direction des affaires publiques. Par la suppression des priviléges, on a cherché à produire l’égalité dans la liberté, et l’on n’a encore obtenu que l’égalité dans l’obéissance. Il est utile que ces deux grands corps passent par cette épreuve pour se dégager complètement de ce qu’ils avaient d’incompatible avec les exigences du présent. Il serait fâcheux néanmoins que tout pérît en eux, car tout n’était pas mauvais. On est trop généralement porté en France à ne voir dans la noblesse et dans le clergé que des instrumens d’oppression ; ils peuvent être aussi, et ils ont été souvent à Naples des instrumens de résistance. Je regretterais même,