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core ; il peut être retenu, et, s’il est relâché, il peut être repris. On comprend combien une pareille disposition est favorable à l’arbitraire, ce fléau des pays soumis au pouvoir absolu. Il serait digne du roi de mettre un terme à un état de choses aussi vicieux. Je sais que la liaison est intime entre la liberté politique et la liberté individuelle, mais je sais aussi que les garanties contre l’abus de la juridiction criminelle peuvent seules consoler les peuples de l’absence de liberté. Les Napolitains n’ont pas encore obtenu ces précieuses garanties ; leur propriété est défendue, leur personne ne l’est pas. Il y a bien loin sans doute de la forme judiciaire actuelle à l’ancien jugement du truglio, qui consistait à condamner sommairement, sans instruction ni défense, dans le seul but de vider les prisons ; c’est quelque chose que ce progrès, ce n’est pas assez.

J’ai déjà parlé des soins que se donne le roi pour l’établissement d’une bonne police. Le résultat obtenu pour la ville de Naples est à peu près complet. L’ordre est parfaitement maintenu sur tous les points de cette ville immense, si pleine de peuple, où il se commettait autrefois plusieurs assassinats par jour. L’admirable organisation de la gendarmerie napolitaine, qui est encore un des bienfaits de l’administration française, n’a pas peu contribué à ce résultat. S’il n’en est pas encore de même dans les provinces reculées du royaume, c’est que les difficultés sont plus grandes ; mais tout permet d’espérer qu’on en viendra à bout avec le temps. Malheureusement la police napolitaine mérite d’autres reproches. Elle participe du caractère général des polices italiennes, qui est d’affecter en quelque sorte des précautions excessives. Le roi actuel a fait singulièrement tempérer dans la pratique ce que les prescriptions avaient en elles-mêmes de dur. Les apparences n’en restent pas moins ce qu’elles étaient sous les règnes précédens, et elles sont effrayantes. Les journaux français sont plus complètement interdits à Naples qu’à Rome même ; il n’y a d’exception que pour le seul Moniteur. On se plaint aussi que la police se mêle de tout, pénètre partout, et substitue souvent son action inquiète, capricieuse et sans contrôle, à l’action régulière des autres agens de l’autorité publique.

On devine que la liberté de la presse n’existe pas à Naples. Les bureaux du seul journal politique qui soit autorisé, le Journal des Deux-Siciles, sont à la préfecture de police, à côté du bureau des passeports. On n’y met pas plus de mystère que cela. Il faut reconnaître cependant que, même sous ce rapport, le roi actuel s’est départi des traditions violentes du passé. Il a créé une publication sous