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LE ROYAUME DE NAPLES.

richesses. Autrefois, nous tirions de Naples tout le coton nécessaire à nos manufactures ; aujourd’hui, cette fourniture est passée aux États-Unis. Si les cotons de Naples pouvaient jamais obtenir, par les soins apportés à leur culture, la qualité et le bon marché des cotons américains, la fortune du pays serait faite. Ce qui est vrai du coton l’est encore, quoique dans de moindres proportions, des huiles, des soies, des laines, etc.

Je ne crois pas exagérer en estimant que la production agricole des états de terre ferme du royaume de Naples peut être facilement doublée. La beauté du climat et la fertilité du sol autorisent à présumer que cette estimation est plutôt au-dessous qu’au-dessus de la vérité. M. Fulchiron évalue le rendement actuel de l’hectare moyen à 120 francs ; il y a des points où ce rendement est déjà bien supérieur ; il est de 260 francs dans la Campanie, et de 460 aux environs de Naples. Le total annuel de la production agricole est maintenant d’environ 600 millions qui portent à peu près exclusivement le fardeau de l’impôt ; ce serait donc à 1200 millions qu’il serait possible de le porter. De plus, un des grands avantages que l’industrie agricole a sur toutes les autres, c’est qu’elle développe en même temps la population. Je ne crois pas aux 20 millions d’habitans que le royaume de Naples aurait, dit-on, nourris dans les temps antiques, mais je crois bien qu’il peut facilement arriver à la moitié de ce chiffre. Qu’on mesure le surcroît de puissance que lui donnerait cette augmentation de richesse et de force. Pour en venir là, il faut vendre une portion considérable des produits du royaume aux nations étrangères, car le pays récolte déjà au-delà de ce qui lui est nécessaire pour sa consommation, et pour vendre il faut acheter. Il n’y a pas moyen de faire autrement. Quant à la perte momentanée que ferait le trésor sur le produit actuel des douanes, si les droits étaient considérablement réduits, il ne faudrait pas s’en inquiéter ; l’augmentation de la consommation et la suppression de la contrebande rétabliraient l’équilibre presqu’immédiatement.

Du reste, si ces changemens sont, comme je le crois, exigés par la nature des choses, ils s’accompliront en quelque sorte d’eux-mêmes tôt ou tard, pourvu que le royaume de Naples continue à jouir de sa condition actuelle. Déjà même l’opinion se forme à Naples dans ce sens, et, pour n’être pas aussi immédiatement puissante que dans les pays libres, l’opinion ne laisse pas d’avoir aussi son action sur les gouvernemens absolus. Ce qu’on doit donc désirer aujourd’hui pour ce pays intéressant, c’est le maintien pur et