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la vue d’une si grande profondeur ; si des langues libertines et insolentes persistent dans leurs objections et leurs murmures, ne craignons pas de nous écrier : « Ô homme ! qui es-tu pour contester avec Dieu ? » C’est la fameuse apostrophe de saint Paul, apostrophe à la fois foudroyante et commode.

L’Institution chrétienne ne serait pas complète si elle n’exposait pas les moyens extérieurs dont Dieu se sert pour nous appeler dans la société du Christ et nous y retenir. Calvin, après avoir expliqué comment nous entrons par la foi en possession de notre salut et de la béatitude éternelle, nous montre Dieu venant en aide à l’infirmité de notre matière pour nous faciliter cette conquête. Dieu a mis le divin trésor de l’Évangile comme en dépôt entre les mains de son église, où il a établi des pasteurs et des docteurs. Il n’est pas possible que ceux qui sont véritablement persuadés que Dieu est leur père, et que Jésus-Christ est leur chef, ne soient pas unis entre eux par les liens d’un amour fraternel, et ne veuillent pas se communiquer les biens qu’ils possèdent. Voilà l’église ; c’est la société de tous les saints. Cette société constitue vraiment l’église universelle, catholique. Dans cette église universelle sont comprises les églises particulières. Toute église se reconnaît à deux signes, la prédication de la parole de Dieu et l’administration des sacremens. Partout où ce double fondement subsiste, ni les fautes des pécheurs, ni certaines erreurs dans la doctrine n’abolissent le caractère de l’église, et il est criminel de s’en séparer sur de futiles prétextes. Mais, quand le mensonge insulte et sape les bases même du dogme, quand le culte divin est défiguré par un amas de superstitions, il ne faut pas croire qu’en se séparant d’une société pareille, on se sépare de l’église de Dieu. Voilà par quelle transition Calvin prélude aux plus furieuses attaques qui aient jamais été dirigées contre la religion catholique.

Le sectaire se donne pleine licence. Il déclare que la corruption de l’église catholique égale celle d’Israël au temps de Jéroboam ; il oppose au papisme l’état de l’église ancienne et la manière démocratique dont elle était gouvernée ; il s’attache à montrer comment toutes les formes ont été corrompues et perverties ; il examine les titres du siége de Rome à la primauté et les rejette ; il parcourt les phases et les degrés de ce qu’il appelle l’usurpation papale, et il salue le pape du nom d’Antechrist, car saint Paul a écrit : L’Antechrist sera assis dans le temple de Dieu. Les pernicieuses erreurs dont les hommes sont infectés, les superstitions qui les aveuglent, la prodigieuse idolâtrie dans laquelle le monde est tombé, tous ces maux