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REVUE. — CHRONIQUE.

sociation avec la Belgique, qui peuvent à eux seuls augmenter du jour au lendemain le revenu de nos douanes de 40 à 50 millions, sans parler des autres augmentations qu’ils amèneraient dans la suite par l’impulsion qu’ils donneraient à l’activité publique. Il y a encore d’autres moyens à prendre dans le même but, mais ceux-là porteraient sur les tarifs mêmes.

D’abord il serait nécessaire de les débarrasser du luxe de prohibitions qui s’y trouve. Que les producteurs nationaux ne s’effraient pas : nous ne demandons pas qu’on admette les produits étrangers dont ils craignent la concurrence, à des conditions où cette concurrence serait possible. Nous demandons seulement que les prohibitions soient remplacées par un droit, quelque fort qu’il soit, qui maintienne le produit étranger à un prix supérieur à celui du produit similaire français, mais qui ne l’exclue pas complètement.

Le remplacement des prohibitions par un droit protecteur est une des sources les plus fécondes qui puissent être ouvertes au revenu public. Il est inutile d’insister beaucoup sur un fait aussi évident par lui-même. Dès que l’entrée en France sera permise à une foule d’objets auxquels elle est maintenant interdite, ceux de ces objets qui entreront acquitteront des droits qui ne sont pas acquittés aujourd’hui. Prise à part, l’importation de chacun des articles ainsi affranchi de la prohibition qui pèse aujourd’hui sur eux, sera nécessairement très restreinte ; mais le nombre en est si grand, et le droit qui les atteindra sera si fort, que le trésor y gagnera beaucoup.

Avec la levée des prohibitions doit venir la réduction de certains droits exagérés. Cette réduction n’aurait pas seulement pour résultat d’amener de la part des étrangers des faveurs nouvelles pour nos produits, et conséquemment un plus grand commerce d’exportation, mais elle produirait encore un mouvement d’importations plus considérable, et par suite un accroissement dans les recettes du trésor. Jusqu’à présent la question des traités de commerce n’a été considérée que sous le point de vue du commerce national ; il y a un autre intérêt qui vient s’unir à celui-là et pousser dans le même sens, c’est l’intérêt du fisc.

Il y a vingt ans, les douanes anglaises ne rapportaient annuellement que de 250 à 300 millions à l’état. Un ministre habile, M. Huskisson, alors président du bureau du commerce, entreprit une révolution dans les tarifs analogue à celle dont nous venons de parler, et c’est cette révolution qui, réalisée en partie, a doublé en vingt ans le revenu des douanes anglaises. Pourquoi n’imiterions-nous pas l’exemple donné par nos voisins ? Voit-on que l’industrie nationale en ait souffert ? Au contraire. M. Huskisson a levé beaucoup de prohibitions, réduit beaucoup de droits excessifs, et l’industrie anglaise n’a fait que trouver dans ces mesures de nouveaux moyens d’émulation et de progrès. La production des soieries, entre autres, qui végétait à l’abri de la protection, a pris un immense essor sous le régime d’une plus libre concurrence.

Aujourd’hui encore, après une longue expérience, c’est l’esprit de M. Huskisson qui anime les hommes d’état anglais. Quand le dernier ministère anglais sentit le besoin d’avoir de nouvelles sources de recettes, il proposa de