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DES ÉTUDES ÉGYPTIENNES EN FRANCE.

cette origine palpable, et l’astrologie dut nécessairement amener avec elle le zodiaque, dont elle ne pouvait se passer.

Le zodiaque lunaire est également le seul que la Chine ait connu d’abord. Le zodiaque en douze signes y a été introduit fort tard, l’an 164 de notre ère, par une ambassade de Marc-Aurèle. Voilà donc le zodiaque qui, au lieu de nous venir d’un peuple antédiluvien, comme le voulait Bailly, ou des sanctuaires de l’Orient, perd son âge vénérable et son air sacerdotal, nous arrive de Grèce et la quitte à une époque fort récente, pour courir le monde en société de l’astrologie. Il en résulte plus d’une conséquence importante. Tous les systèmes qui veulent expliquer les anciennes religions par l’astronomie zodiacale sont par là frappés de nullité. On a souvent attribué aux premiers âges du monde, non pas seulement une riche inspiration, une vive et poétique intuition, ce qu’ils avaient sûrement, mais encore une science positive plus tard perdue on ne sait pourquoi ; la prétendue antiquité du zodiaque était donnée comme une preuve décisive ; cette preuve tombe.

On a cru aussi que la Grèce devait presque tout à l’Orient. Ce petit peuple, au contraire, dont le pays marque à peine sur la carte, eut un développement éminemment original, rendit à l’Orient une véritable science pour prix des notions vagues et incertaines qu’il en avait reçues, répandit jusque dans de lointaines contrées de l’Asie et de l’Afrique sa langue, ses idées, ses découvertes, et, par son génie et l’épée d’Alexandre, sut conquérir un vaste empire à sa civilisation.

Voilà des résultats nouveaux, étendus, qui touchent aux questions les plus intéressantes de l’histoire. Le point de départ n’était pourtant, ne l’oublions pas, que quelques caractères grecs tracés sur une pierre, qui paraissaient exprimer un fait bien insignifiant. Ce n’est pas la seule fois que cette bonne fortune arrive à M. Letronne. Elle lui est trop habituelle pour qu’il n’y ait pas un peu de sa faute à la rencontrer ainsi. Il excelle à déduire d’un fait toutes ses conséquences. Il ne lui permet pas de rien cacher ; il le harcelle, il ne lui laisse pas de trêve qu’il ne l’ait forcé à se rendre à discrétion, et cela toujours avec une aisance, une liberté d’allures si parfaites, qu’on le suit sans la moindre peine. — Rien qui trahisse ou qui exige l’effort. Ces déductions ont beau cependant être naturelles : elles sont si imprévues, qu’elles donnent le plaisir d’une découverte, et que souvent elles ont le charme du paradoxe. Pourquoi s’en étonner ? Quand on ne veut pas penser avec la tête de son voisin, quand on se met à tout ignorer