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DU CRÉDIT ET DES BANQUES.

férentes. Comme il est rare, d’ailleurs, qu’un seul de ces établissemens embrasse à la fois toutes les branches d’un commerce si étendu, il est très difficile de rencontrer deux banques, à moins qu’elles ne soient copiées l’une sur l’autre, dont tous les procédés soient identiques : ce qui semble interdire toute pensée d’une classification rigoureuse et absolue. On peut cependant admettre quelques divisions générales. Ainsi l’on a distingué les banques territoriales d’avec les banques commerciales, et rien n’empêche de s’arrêter à cette distinction. C’est peut-être la seule qui soit vraiment générique. Commençons donc par considérer les banques territoriales, dont nous aurons peu de choses à dire. Nous nous arrêterons ensuite aux banques commerciales, qui sont le principal objet de cet écrit.

Les banques territoriales, telles qu’on les a conçues dans plusieurs pays, sont établies en vue de la propriété foncière, et leur objet est de procurer des avances aux propriétaires du sol. Elles émettent des billets, dont la valeur est garantie par une sorte d’hypothèque sur les biens-fonds, et qui portent un intérêt servi par les produits annuels du sol. Plusieurs banques de ce genre sont établies dans le nord de l’Europe, en Suède, en Pologne, en Prusse, etc. Voici en général leur manière d’opérer. Tout propriétaire de terres ayant besoin d’argent pour son exploitation peut s’adresser à la banque, qui, moyennant une garantie hypothécaire sur la valeur totale de ses propriétés, lui fait des avances jusqu’à concurrence des deux tiers ou des trois quarts de cette valeur. Les avances ainsi faites ne sont pas remboursables à terme fixe, mais elles portent un intérêt annuel, par exemple, de 5 pour 100. Afin d’opérer peu à peu sa libération, le propriétaire qui a reçu des avances de la banque s’oblige à lui payer tous les ans, outre les intérêts, un à-compte de 3, 4 ou 5 pour 100, de manière à amortir insensiblement sa dette. Quant à la banque, elle se procure les fonds dont elle se sert pour ses avances, en émettant des billets contre de l’argent. Ces billets sont des titres au porteur, qui se passent de main en main, et circulent dans le public. On pense bien qu’ils ne sont pas remboursables à vue, car la banque, ne rentrant dans ses avances qu’insensiblement et après un long terme, ne serait pas en mesure d’opérer un semblable remboursement ; mais, par compensation, ils portent intérêt à raison de 5 pour 100 par an, plus semblables en cela à nos titres de rentes publiques qu’à nos billets de banque. La banque reçoit ainsi tous les ans des propriétaires fonciers l’intérêt des avances qu’elle leur a faites, et les distribue ensuite aux porteurs de ses billets.

Tel est en peu de mots le système des banques territoriales. Il a été exposé avec plus de détails dans plusieurs écrits publiés par des Polonais résidant en France, et notamment dans un ouvrage estimable de M. Cieszkowski, qui a paru sous ce titre : Le Crédit et la Circulation. Ce que nous venons de dire suffit pour en faire comprendre le but et les principaux moyens.

À le bien prendre, ceci n’est autre chose qu’une sorte de centralisation des prêts hypothécaires et de l’hypothèque elle-même. La banque se substitue seule à la foule des prêteurs qu’elle représente, en même temps qu’elle ras-