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L’ANGLETERRE ET LE MINISTÈRE TORY.

tout son revenu ? Était-il juste que le clergyman, qui ne transmet pas son revenu à ses enfans, prélevât sur ses dîmes 3 p. 100, ni plus ni moins que le propriétaire sur ses fermages ? C’est d’ailleurs d’une taxe sur le revenu qu’il s’agit. Quelle que soit la source du revenu, peu importe. Il y aurait bien plus d’injustice à vouloir distinguer qu’à appliquer à tous une règle uniforme et inflexible.

Tels sont, en gros, les argumens que sir Robert Peel opposa à ses adversaires, et il fut en général secondé par lord John Russell, qui, tout en combattant l’income tax dans son principe, reconnut qu’une fois admise elle devait frapper tous les revenus sans distinction. L’amendement de M. Roebuck, qui tendait à réduire à moitié la taxe sur les revenus commerciaux et professionnels, fut donc rejeté à la majorité de 258 voix contre 112, et un autre amendement, qui établissait une distinction entre les rentes perpétuelles et les annuités, n’obtint que 117 voix contre 257. Par des raisons à peu près analogues, on décida qu’on ne pourrait déduire sur les profits que l’on fait d’un côté les pertes que l’on subit de l’autre, et que, par exemple, le propriétaire foncier commerçant paierait dans tous les cas 3 pour 100 de son revenu territorial. On décida aussi, à 207 voix contre 40, que les annuités, dividendes et actions appartenant à des étrangers, seraient atteints comme s’ils appartenaient à des sujets britanniques. Le bill passa donc, en définitive, sans aucune espèce de modification importante, et précisément tel que le voulut le cabinet.

À la chambre des lords, ce fut lord Brougham qui se chargea d’attaquer le principe du bill, et lord Landsdowne qui proposa l’amendement whig ; mais, après une discussion assez vive, cet amendement fut rejeté par 112 voix contre 52, et, quelques jours après, la loi passa à 98 voix contre 28.

Je viens à la mesure qui se lie étroitement à celle de l’income tax, et qui, bien plus que celle-ci, assure à sir Robert Peel une grande place dans l’histoire financière de son pays.

Il fut un temps, et ce temps est peu éloigné, où M. Huskisson, malgré la timidité de ses actes, malgré la réserve de ses paroles, était l’effroi des tories, qui l’accusaient de vouloir, pour réaliser de vaines théories, sacrifier la législation protectrice de l’industrie nationale et de la richesse du pays. Or, si M. Huskisson pouvait renaître avec ses idées de 1827, je ne suis pas certain qu’il osât suivre le chef des tories dans la hardiesse de ses mesures et de ses déclarations. Ce n’est plus, excepté peut-être en ce qui touche l’agriculture, le langage prudent et ambigu a l’aide duquel on cherche à prouver aux uns que,