Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 32.djvu/667

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
666
DE L’UNION COMMERCIALE.

convénient de subir un contrôle administratif, d’acquitter un impôt, de perdre du temps à la frontière, les communications devront prendre une nouvelle activité. Les rapports de la Belgique avec la France deviendront aussi fréquens que ceux de nos départemens entre eux. Il se passera quelque chose d’analogue à ce que l’on vit en France, lorsque les douanes intérieures, qui existaient de province à province, furent supprimées par un décret de l’assemblée constituante, et les échanges se multiplieront ainsi que les besoins.

À quelques égards, l’union commerciale ne fera qu’aller au devant d’une nécessité prochaine. Le chemin de fer belge a franchi la frontière ; il pénètre sur notre territoire par Lille et par Valenciennes, et avant peu d’années il s’y ramifiera plus loin par les embranchemens qui suivront, l’un la vallée de la Sambre, et l’autre la vallée de la Meuse vers cette vieille France que le pays wallon continue. La France ne résistera pas long-temps à ces avances qui la sollicitent, et nous pousserons tôt ou tard, à la rencontre des chemins belges, des lignes de fer qui les joindront à Paris. Lorsque cela sera fait, et que des convois de quatre à cinq cents personnes, se succédant d’heure en heure avec bagages et marchandises, arriveront à la frontière, où trouvera-t-on l’armée de douaniers qu’il faudrait pour les visiter ? Et quand on la trouverait, est-ce que tant de voyageurs réunis consentiront à couper, par une halte de cinq à six heures, le trajet de Paris à Bruxelles que la vapeur mettra déjà huit heures à franchir ?

La difficulté que nous signalons s’est présentée, quoique dans de moindres proportions, pour l’exploitation des tronçons qui vont, de Lille et de Valenciennes, rejoindre la frontière belge, et il a fallu, pour la résoudre, une convention diplomatique entre les deux gouvernemens. Cette convention fait brèche aux barrières de douanes par plus d’un côté : elle pose le principe de la communauté des intérêts entre les deux peuples ; et elle serait parfaite, si elle pouvait être logique ; mais elle s’arrête précisément sur le seuil de la liberté commerciale, et, de peur de rendre la douane inefficace, elle laisse subsister en grande partie les entraves qui gênent les communications. Ainsi, par l’article 25 de la convention, les habitans du département du Nord et ceux des provinces limitrophes belges sont dispensés de l’obligation de se munir de passeports à l’étranger, pour voyager par les chemins de fer des deux pays. Il leur sera délivré des cartes-passeports que l’on assimile aux passeports à l’intérieur. Voilà donc la Belgique considérée comme une province française, en ce qui touche les mesures de police et la sûreté des personnes ; c’est un premier pas vers l’association.

L’article 38 et les suivans vont beaucoup plus loin : ils stipulent que, de Valenciennes à Mons, et de Lille à Courtray, le chemin de fer sera exploité en commun par l’administration française et par l’administration belge ; que les recettes seront partagées ; que les locomotives pourront renouveler leur approvisionnement en coke et en eau dans les stations belges comme dans les stations françaises, et seront admises des deux côtés de la frontière à se réparer dans les ateliers. Ne semble-t-il pas que les deux administrations