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SITUATION FINANCIÈRE DE LA FRANCE.

« L’importance de l’emprunt devait être déterminée par les besoins et les convenances du trésor ; or, le trésor était dans l’abondance, mais l’abondance lui venait de l’émission de ses obligations à terme, des sommes déposées par les caisses d’épargne, les communes et les établissemens publics, et qui s’élevaient ensemble à plus de 350 millions. La prévoyance nous faisait un devoir de ne pas laisser dépasser à la dette flottante de sages limites. D’un autre côté, il nous était démontré qu’avec une ressource supplétive de 150 millions et l’emploi intelligent des moyens de trésorerie, on pouvait faire face, pendant deux années au moins, à toutes les dépenses prévues. Il n’y avait pas lieu de pousser les précautions plus loin.

« Le choix de l’effet public sur lequel il convenait le mieux d’emprunter, a été de notre part l’objet d’un examen approfondi. Une adjudication de rentes 5 pour 100 au-dessus du pair pouvait affaiblir le droit de l’état de rembourser sa dette au pair ; ce droit, je l’ai constamment soutenu, et mes convictions me faisaient un devoir de le conserver intact. La rente 4 1/2 avait aussi dépassé le pair, et la considération que nous venons d’exposer lui était également applicable. Nous avons médité avec quelque préférence l’idée de mettre en adjudication des rentes 4 pour 100 ; mais l’emprunt est un contrat parfaitement libre : l’un des contractans ne peut pas imposer à l’autre la loi de ses convenances ; nous avons dû pressentir celle des capitalistes, et je n’ai pas tardé à me convaincre que la rente 4 pour 100 n’était pas la valeur sur laquelle il fût possible d’asseoir un emprunt dans les circonstances actuelles. Trop près du pair, elle n’offrait pas dans une mesure suffisante cette mieux-value éventuelle que recherchent les prêteurs. Il était à prévoir que, pour accroître cette éventualité, on ne vous offrirait qu’un prix fort inférieur à la valeur intrinsèque de l’effet dont il s’agit. Une création de rentes 3 1/2 pour 100 ne se présentait pas avec des garanties de succès. L’impossibilité de juger à l’avance si ces rentes seraient bien ou mal accueillies sur le marché, la difficulté d’apprécier la valeur vénale d’un nouveau fonds émis dans d’étroites limites, et qui n’avait pas eu cours en France, laissaient trop d’incertitude dans les esprits ; les prêteurs n’auraient pas manqué de se mettre à couvert des risques par des offres insuffisantes. Restait la rente 3 pour 100.

« L’adjudication a été faite au prix nominal de 78 fr. 52 cent. 1/2 pour 3 francs de rentes, et au prix réel de 76 fr. 75 cent. en tenant compte, à l’intérêt de 4 pour 100, des facilités de paiement qui ont été accordées. En d’autres termes, l’état s’est constitué débiteur, pour