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Quoi qu’il en soit, les débats politiques vont reprendre leur cours dans l’une et dans l’autre chambre. Demain, le projet de loi sur les fonds secrets sera, dit-on, présenté à la chambre des députés. La question ministérielle sera probablement vidée la semaine prochaine.

Il circule à ce sujet des bruits qui seraient alarmans pour le cabinet s’ils avaient quelque fondement. On dit qu’un certain nombre de conservateurs se détachent définitivement de l’armée ministérielle ; que le ministère, s’il ne périt pas par la parole, périra par les houles ; qu’on veut à tout prix essayer d’un nouveau mélange, d’une coalition nouvelle. Des bruits de cette nature ne circulent pas sans être accompagnés d’une liste de ministres. Il y en a de trois nuances, peut-être de quatre. Nous ne voulons pas jeter ces noms à la curiosité du public. Qu’il se donne un peu de peine et qu’il devine ; un ou deux exceptés, il est facile de les deviner.

Dans la lutte qui se prépare, il est quelques faits qui seront pour le cabinet un embarras et un danger : avant tout, les éloges dont la presse étrangère l’accable. S’ils ne sont pas perfides, ces éloges, accompagnés d’injures pour la chambre et pour le pays, sont pour le cabinet une faveur déplorable. On a été jusqu’à accuser les ministres de se les être procurés. En vérité, nul n’a le droit de leur imputer une conduite si stupide.

La nomination de M. l’amiral Roussin a également aigri quelques esprits. Ce qui nous a surpris plus que la nomination elle-même, c’est l’inopportunité du moment. Un arrondissement de Paris allait procéder à une élection des plus contestées. Des élections de députés allaient également se faire à Châlons, à Beauvais. N’importe : au lieu de prier M. l’amiral Duperré de garder son portefeuille jusqu’à la fin du mois, on s’empresse de jeter à la polémique le nom de M. Roussin, nom sans doute des plus respectables, mais qui n’était pas moins celui d’un défenseur du droit de visite. Pourquoi cet empressement ? Dans quel but ? Quelle utilité pouvait-on attendre de l’adhésion immédiate de M. l’amiral Roussin au cabinet du 29 octobre ? Quelle force y apporte-t-il ? Qu’a-t-on voulu ? Se donner un air d’indépendance ? Interpréter le paragraphe de l’adresse ? Le commenter à son tour ? Nullement. On a voulu éviter tel ou tel aspirant au ministère de la marine ; on n’a pas osé confier ce ministère à un civil, et on a prié M. l’amiral Roussin de tirer le cabinet d’embarras. On a dû comprendre après coup que si la nomination de M. Roussin a indisposé une dizaine d’électeurs sur seize cents dans le troisième arrondissement, cela a suffi pour donner partie gagnée à l’opposition.

À ces faits fâcheux le ministère peut aujourd’hui opposer un heureux résultat de ses démarches et de sa persévérance. Le gouvernement espagnol a désavoué l’imputation portée par l’ancien chef politique de Barcelone, M. Gutierrez, contre le consul de France M. de Lesseps. Ce désavœu se trouve formellement exprimé dans la gazette officielle de Madrid, sous la forme d’une lettre du ministre de l’intérieur au ministre de la guerre. Le ministre déclare que l’assertion du chef politique n’était pas exacte, et que les